Homélie nuit de Noël 2013

Mardi 24 décembre 2013 - Nuit de Noël, Année A

St Jean-Baptiste (Bourgoin-Jallieu)

Is 9,1-6 / Ps 95 (96) / Tt 2,11-14 / Lc 2,1-14

Au cœur de cette nuit et après avoir entendu ces textes, j’aimerais que nous nous demandions : que se passe-t-il ? Et plus précisément : que se passe-t-il pour nous ? Pas seulement : pourquoi sommes-nous là ? Mais bien : qu’est-ce qui est en train de se jouer pour chacun d’entre nous ?

Ce soir, dans cette nuit, nous fêtons la venue de Jésus. Jusque là, pas de grand scoop ! Nous célébrons sa venue, nous en faisons mémoire. Je dis bien sa venue et non pas son anniversaire car, au risque d’étonner certains d’entre vous, je vous rappelle que Jésus n’est sans doute jamais né un 25 décembre même si les précisions historiques de l’évangile qu’on vient d’entendre veulent nous dire que Jésus est bien venu dans notre histoire, qu’il est né à une époque bien déterminée – tous les historiens sont d’accord là-dessus. Il n’est donc pas né dans la nuit du 24 au 25 décembre, mais il se trouve que cette date est symboliquement importante car elle dit quelque chose de notre foi en Celui que nous fêtons ; je m’explique : la nuit du 24 décembre est une des premières nuits de l’hiver où le soleil gagne à nouveau quelques secondes ou une minute – je ne sais pas exactement – sur la nuit. Au cœur des plus longues nuits de l’hiver, la lumière commence à reprendre le dessus.

La 1ère lecture nous a parlé de cette histoire de nuit et de lumière. « Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une lumière ; dans la pays de l’ombre, une lumière a resplendi ». Cette lumière, annonce le prophète Isaïe ce sera la paix pour le peuple. Et cette lumière, cette paix, ajoute-t-il, c’est par un petit enfant qu’elle doit être donnée au monde… Le peuple attendait son sauveur, son libérateur, Celui que Dieu a promis et que l’Evangile appelle le Messie, c’est-à-dire le Sauveur. Et c’est ce petit enfant que nous célébrons en cette nuit de Noël, il est Celui que le peuple attendait, Celui qui doit délivrer le peuple de ce qui l’opprime et de ce qui entrave sa liberté, Celui qui doit permettre à la lumière de prendre le dessus sur les nuits et les ténèbres de notre vie. Il est Celui qui peut nous aider à y voir plus clair sur ce chemin parfois obscur de notre recherche de bonheur et d’un sens à notre vie.

Alors ce soir, nous voilà invités à regarder, regarder vers le Christ, vers Jésus ; ce soir mais tout autant chaque jour… Regarder vers lui, le regarder, comme une petite étoile qui brille dans la nuit – dans cette nuit de Noël mais bien plus encore dans toutes ces nuits de désespérance ou de questionnement que les uns et les autres nous avons parfois à traverser – ; regarder vers lui, Jésus, et le regarder, jusqu’à ce que l’aurore commence à poindre, comme dirait St Pierre dans une de ses lettres qu’on trouve dans nos Bibles, c’est-à-dire regarder vers Jésus, nous tourner vers lui, essayer de l’accueillir dans notre vie, jusqu’à ce que l’espérance et surtout la confiance nous envahissent, petit à petit, jusqu’à ce que la paix nous gagne, un peu, et petit à petit… Voilà le mystère que nous fêtons cette nuit ; la voilà cette bonne nouvelle, cette grande joie dont nous parle l’évangile qu’on vient d’entendre, voilà ce qui nous rassemble en cette nuit.

Comment accueillons-nous cette nouvelle ? Est-elle, de fait, une « bonne » nouvelle, quelque chose qui fait du bien et qui pourrait nous donner à entrevoir de la joie et à la laisser grandir en nous ? Le peuple d’Israël, c’est-à-dire le peuple des croyants au Dieu unique révélé et annoncé par les prophètes, était dans l’attente, l’attente de ce Sauveur, ce petit enfant qu’Isaïe appelle déjà dans la 1ère lecture le Prince de la Paix. Et c’est parce qu’ils espéraient quelque chose de Dieu, parce qu’ils se rappelaient que même dans les longues traversées du doute et de la révolte contre Dieu il était en fait resté présent, parfois bien silencieusement et comme absent, mais là quand même, c’est parce que le peuple a réussi à en faire l’expérience, parce qu’il a gardé quand même confiance, parfois envers et contre tout, c’est à cause de tout cela que le peuple d’Israël est capable d’entendre et d’accueillir cette bonne nouvelle, de l’entendre et de l’accueillir comme une grande joie.

Ceci dit – et vous auriez raison de me le faire remarquer – tout cela aurait pu passer complètement inaperçu. Car Jésus est né (1) quasiment seul, (2) de nuit, (3) à l’écart parce qu’« il n’y avait pas de place pour eux dans la salle commune », et ce sont (4) des bergers, des pauvres et sans doute des illettrés, qui ont accueilli cette nouvelle étonnante de la naissance de l’enfant et donc de la venue de Dieu dans notre monde… Aujourd’hui encore cela passe souvent inaperçu. Aujourd’hui encore Jésus veut nous rejoindre et renaître en chacun de nous pour naître à ce monde qui est le nôtre, mais aujourd’hui encore tout cela manque de passer inaperçu. Et nous voilà, ce soir, comme ces bergers, des veilleurs de la nuit à qui est confiée cette nouvelle étonnante et peut-être incompréhensible pour certains d’entre nous ou pour ceux qui nous entourent. Qu’allons-nous en faire ? Sommes-nous déjà prêts à l’accueillir en nous, pour nous aujourd’hui, au cœur de ce que nous vivons les uns et les autres ?

Pour vous aider à répondre à méditer cela, personnellement, je vous laisse avec deux questions qui se rejoignent et surtout que je vous propose que nous laissions résonner quelques instants dans le silence de nos cœurs et surtout dans le silence de cette nuit :

  • Qu’attendons-nous de Dieu – si nous acceptons de faire ce pari de confiance qu’il existe, malgré ses silences apparents ou nos impressions d’absence, parfois. Qu’attendons-nous de lui ?
  • Et puis – c’est ma 2ème question – que traversons-nous les uns et les autres ? Quelles sont ces nuits, ces ténèbres et même ces parts d’ombre qui nous habitent ou que nous devons affronter, aujourd’hui, dans ce monde qui est le nôtre ? Sommes-bous prêts à demander au Seigneur qui vient nous rejoindre ce soir et qui va se donner à nous dans le mystère de l’eucharistie, sommes-nous prêts à lui demander qu’il vienne là, dans ces zones d’ombres et de nuit, qu’il vienne là nous rejoindre et qu’il vienne là nous éclairer de sa paix, la paix du cœur ?

Nous prenons quelques instants de silence pour déposer au Seigneur tout ce qui est là en nous, tout ce que ces mots éveillent en nous…

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