Homélie dimanche 6 septembre 2015

23ème dimanche du Temps Ordinaire / Année B

Petites sœurs des Maternités catholiques - Médipôle BJ (dimanche soir)

Is 35,4-7a / Ps 145 (146) / Jc 2,1-5 / Mc 7,31-37

Dans nos assemblées paroissiales, ou encore hier en journée de préparation baptêmes, il arrive assez souvent qu’on trouve des gens qui n’aiment pas trop ces histoires de miracles. Et certains, peut-être parmi nous, ne sont d’ailleurs pas forcément très à l’aise avec la notion de guérison en général… Du coup nous avons vite fait de trouver qu’un texte d’évangile comme celui qu’on vient d’entendre n’a pas grand-chose à nous dire. Je pense mes sœurs que ce n’est pas à vous qu’il faudra rappeler qu’un miracle et même des miracles c’est possible ! La question ce sera comment on accueille ça et ce qu’on en fait pour notre chemin de foi personnel et communautaire.

Ce qu’il faut en tout cas se rappeler, nous tous – qu’on y croit ou qu’on ait du mal – c’est d’abord que ces gestes de guérison miraculeuse n’étaient sans doute pas si extraordinaires que cela à l’époque de Jésus. Il y avait des « guérisseurs », et Jésus, visiblement, avait ce « pouvoir » là, comme d’autres autour de lui, comme d’autres aujourd’hui encore ont, semble-t-il, des dons de cet ordre…

Il est vrai que nous ne sommes pas forcément très à l’aise avec cette chose là parce qu’il y a comme un appel à une démaîtrise ; ça nous échappe, ça ne rentre pas dans nos cases très rationnelles et très occidentales ou plutôt très européo-centrées. Et puis nous ne sommes pas très à l’aise spontanément parce que nous voyons que cela ne fonctionne pas comme ça dans notre vie de tous les jours, du moins apparemment.

Ceci dit, parfois nous aimerions qu’il y ait des miracles dans notre vie, nous aimerions que Jésus intervienne et nous guérisse, de notre cancer ou de notre paralysie ou de notre maladie de parkinson ou de je ne sais quoi encore. Demandez à des grands malades pourquoi ils vont à Lourdes ; certains – pas tous, évidemment – vous répondront qu’on ne sait jamais, si le bon Dieu pouvait faire quelque chose…

Parfois aussi, nous ne supportons pas cette notion de miracle ou de guérison, parce qu’il y a comme une jalousie inconsciente en nous : pourquoi telle personne a été guérie et pourquoi tant d’autres ne le seraient pas, « dont moi qui pourtant souffre beaucoup aussi » – se disent certains en eux-mêmes… Et c’est une vraie question !

Pourquoi certains et pas d’autres ? On ne sait pas. Non pas que les uns soient meilleurs que les autres, c’est sûr, parce que Dieu ne récompense pas pour je ne sais quel mérite. Mais certains et pas tous parce que leur mission à eux ce sera d’être signe autour d’eux que Dieu est là, malgré tout, qu’il est là à nos côtés, mystérieusement, y compris quand nous sommes malades ou souffrants et même, d’ailleurs, au cœur de ces traversées ; que malgré tout il nous accompagne et qu’il ne nous demande qu’une seule chose, croire, ouvrir nos yeux à sa présence, et découvrir, avec lui, qu’il y a une guérison dont nous avons tous besoin, la guérison du cœur, la transformation du cœur. Et que cette guérison, elle nous concerne tous, malades ou bien-portants. Ça rejoint l’appel qu’on a entendu dans la 1ère lecture : « Voici votre Dieu (…). Il vient lui-même vous sauver. » L’entendons-nous, pour nous ?

Dans l’évangile – et donc aujourd’hui encore – les quelques guérisons sont des signes concrets, donnés à certains, de ce salut qui nous est promis à tous. Je vous rappelle que la salut c’est être délivré de tout ce qui nous empêche de vivre, de vivre pleinement ; être délivré de tout ce qui nous recroqueveille ou nous referme ; c’est être libéré de ce qui emprisonne nos vies. Et c’est parce que petit à petit le Seigneur nous libère, c’est parce que petit à petit la paix du cœur nous gagne et nous fait vivre, que nous pourrons en même temps travailler à la libération de l’homme dans notre monde et dans notre société.

L’enjeu il est donc double : voir dans notre vie à chacun ce qui a besoin d’être sauvé, libéré, et le confier au Seigneur ; et voir autour de nous quels sont ces lieux où nous pouvons agir concrètement pour faire œuvre de salut, au nom de Dieu qui nous appelle à être ses mains pour prendre soin et sa voix pour annoncer une espérance qui relève. L’enjeu il est d’être des témoins en actes de la vie qui est là, toujours, malgré les apparences, l’enjeu il est de la faire jaillir au cœur d’une relation qui fasse grandir la confiance et la paix en celui ou celle qui a besoin d’être relevé ou libéré de ce qui l’empêche de vivre bien. C’est par exemple ce que nous permettons et vivions quand nous visitons des malades ou des personnes seules. Mais c’est aussi ce que nous célébrons dans le sacrement des malades quand nous demandons la guérison et que célébrons Dieu qui donne son salut ; le faisant, nous libérons de la confiance, en Dieu et donc en la vie, ce qui libère concrètement la vie et permet à des personnes malades de revivre, de se sentir libérées, même si elles vont quand même mourir un jour…

Je reviens à notre texte d’évangile, cette guérison où celui que Jésus rencontre entend et parle à nouveau. Figurez-vous que nous avons tous vécu la même chose au jour de notre baptême, après le rite de l’imposition de la main. Le prêtre ou le diacre a dit à chacun de nous : « Que le Seigneur Jésus qui a fait entendre les sourds et parler les muets te donne d’écouter sa parole et de proclamer la foi pour la louange et la gloire de Dieu notre Père »… Je retiens pour nous que vivre en disciples de Jésus c’est accepter de nous laisser libérer de ce qui nous empêche d’ouvrir grand nos oreilles à ce que Dieu nous dit et veut nous dire pour entendre l’appel qu’il nous fait et pour l’annoncer en paroles mais aussi en actes autour de nous, comme je viens de le dire.

Et cet appel il est double : nous ouvrir toujours et encore à sa présence, qui est à entendre en nous, par la Parole aussi, mais également dans le frère rencontré ; une présence à entendre, donc, en gardant confiance qu’il est là, le Christ, que nous pouvons lui déposer ce qui fait notre vie et que lui et peut-être même lui seul peut nous apporter la paix du cœur ; et puis, deuxième volet de cet appel, une présence à annoncer : Dieu a besoin de nous pour offrir le salut, par tout ce que nous pouvons être, dire et faire, les uns pour les autres. C’est notre mission; et le miracle c’est que Dieu ait besoin de nous pour cela, qu’il nous fasse cette confiance là. Et le miracle, c’est même qu’il se donne à nous, par le sacrement de la présence de son Fils, dans l’eucharistie, pour que nous soyons cette présence agissante aujourd’hui, cette présence de salut… Nous nous préparons à ce mystère qui nous rassemble en laissant monter en nous ce que ces mots et ces Paroles réveillent, et ce soir encore nous confions tout cela au Seigneur, dans le silence de nos cœurs, maintenant…

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