Homélie mercredi 4 septembre 2019
Mercredi de la 22ème semaine du Temps Ordinaire
Paroisse St Joseph - Grenoble
Col 1,1-8 / Ps 51 (52) / Lc 4,38-44
En méditant ces textes ce matin, comme Paul dans la 1ère lecture j’ai eu envie de rendre grâce, et notamment de rendre grâce pour ce que je pressens ici à St Jo, ce que je pressens de la Parole qui progresse sans doute en chacun de vous, messe après messe déjà mais aussi peut-être dans des Frat’ ou pour l’un ou l’autre d’entre vous dans telle ou telle soirée ou parcours de formation que vous avez pu vivre.
J’ai eu envie aussi et peut-être d’abord – je vous l’avoue – de rendre grâce pour cela dans ma propre vie, et je pensais tout spécialement à ces dernières années avec de longs mois de maladie que j’ai eue à traverser où la prière et la Parole de Dieu ont vraiment été ma bouée de secours, ma bouée de sauvetage, mon salut, pour garder confiance en Dieu même si je n’étais pas guéri miraculeusement comme j’aurais rêvé, un peu magiquement, comme a pu l’être la belle-mère de Pierre dans notre évangile de ce soir.
J’aimerais que ce soir, chacun, on puisse se demander : de quoi je peux rendre grâce au Seigneur, moi aussi ?
Et c’est vrai que je me disais que d’ici quelques mois, quelques années même, moi, Christophe, j’aimerais pouvoir rendre grâce par exemple de ce que ma prédication parmi vous, et celle de Patrick et d’Emmanuel, aient pu avoir une certaine fécondité pour vous… Et surtout que je puisse être témoin de ce que la Parole aura travaillé dans le cœur de chacun…
Une autre chose pour laquelle j’aimerais rendre grâce comme Paul, que ce soit dans quelques mois ou quelques années, mais dès maintenant en fait, car je crois que je le vois déjà, c’est rendre grâce pour l’amour mutuel qui se vit ici dans cette paroisse. Nos communautés chrétiennes devraient être des lieux d’amitié, amitié entre nous et amitié avec le Christ. Je pressens quelque chose de cela ici et je trouve déjà que c’est très beau…
Ceci étant, je reviens à cette histoire de guérison de l’évangile et ce que ça a réveillé de ma propre histoire. J’aimerais que nous puissions tous, chacun, chanter la fidélité de Dieu pour nous, comme dans le psaume. Je crois pourvoir témoigner, je crois avoir fait l’expérience, oui, que Dieu agit. Pas forcément comme on aurait rêvé, pas miraculeusement, mais il agit, il peut se passer quelque chose en nous de l’ordre d’une guérison.
Je repense par exemple dans mon histoire à un évènement de ces derniers mois que j’ai envie de vous partager... Je me rappelle très bien, c’était le Vendredi Saint de cette année. Je méditais les textes du jour et voilà que je bute sur une affirmation dans une des lectures : « Par ses blessures (celles du Christ) nous sommes guéris ». Et là, une espèce de colère en moi, parce que je n’étais pas guéri de ma maladie et que je n’y comprenais rien à tout ça, à ce que ça pouvait bien vouloir dire et à ce que Dieu faisait ou ne faisait pas… Et là, en même temps, une espèce de certitude intérieure : je fais l’expérience que la vie en moi est plus forte que cette maladie, que c’est plus fort que ce mal qui me ronge, que je suis vivant et que je vis des choses très belles que je n’aurais jamais imaginé vivre…
J’étais bouleversé de cette petite expérience spirituelle. Qui n’enlevait pas la maladie mais qui me faisait toucher du doigt, je crois, une forme de guérison. La guérison intérieure, une guérison du cœur. Celle qui permet de croire vraiment que Dieu est là, qu’il porte avec nous, même au cœur de ce que nous avons à traverser que nous aurions tellement voulu ne pas avoir à vivre.
Eh bien là, là encore, il faut rendre grâce !
Ceci dit, comment comprendre alors ces histoires de guérisons miraculeuses dans l’Évangile ? On l’a entendu ce soir encore, Jésus guérit…. On a aussi entendu que les gens en voudraient plus, et qu’on lui amène plein d’infirmes. Mais qu’il ne veut pas tous les guérir puisqu’il leur dit qu’il doit s’en aller ailleurs ; ce qu’il fait !
Il ne va pas tous les guérir, comme s’il ne venait pas pour cela. En tout cas pas comme on le croit spontanément. On voudrait qu’il soit une sorte de faiseur de miracles or lui n’est pas venu pour cela, il n’est pas venu seulement pour cela. Jésus est venu pour quelque chose de bien plus grand.
Sa mission c’est d’annoncer le salut, dont ces miracles, ces guérisons, sont le signe, le signe qu’il peut nous sauver, le signe qu’il vient de Dieu, le signe que Dieu est là et nous sauve. Il nous sauve ça veut dire qu’il nous libère de ce qui nous empêche d’être pleinement vivant, ce qui nous cloue au sol ou qui nous replie sur nous. Il nous en sauve, ça veut dire qu’il nous le promet et que déjà nous pouvons en faire un peu l’expérience.
Ça se fera je ne sais comment, au sens où ça se fera de plein de manières différentes selon le mal qui nous ronge et selon notre histoire à chacun. Mais c’est ça qui nous est promis et que Dieu veut pour nous.
Alors je me disais qu’on pourrait essayer de faire mémoire ce soir des expériences de salut que nous avons peut-être pu vivre déjà. Ces fois où nous avons été rejoints, relevés, remis en route, ces évènements ou ces rencontres où nous avons trouvé ou retrouvé sens ou saveur à la vie, malgré ce qui était difficile à vivre, ces évènements ou ces rencontres où une parole ou un geste ont été de l’ordre d’une consolation, ou d’un pardon, quelque chose qui a donné sens au cœur de ce qui était traversé.
Voilà, tout simplement rendre grâce pour ces visages, ces situations, qui ont été de l’ordre, je le crois, d’un agir de Dieu, ces mains qui ont pris soin et par lesquelles, je le crois, Dieu prenait soin de nous, ces voix qui ont osé une présence ou une parole et par lesquelles, là aussi, Dieu nous a peut-être parlé...
Tout simplement nous prenons quelques instants de silence pour cela, pour l’offrir ensuite en action de grâce avec le pain et le vin de l’eucharistie par lesquels Jésus veut nous rejoindre au cœur du concret de ce que nous vivons. Amen.