8 Avril 2021
Jeudi de la 1ère semaine de Pâques
Ac 3,11-26 / Ps 8 / Lc 24,35-48
C’est quand même étonnant cette histoire… Nos disciples, nos deux pèlerins d’Emmaüs mais aussi Simon-Pierre dont on entendait hier qu’il avait lui aussi vu Jésus ressuscité, comment se fait-il que déjà ils ne le reconnaissent pas ? Ils viennent de faire l’expérience qu’il peut être là, que c’est vrai, qu’il est bien vivant, qu’il les rejoint. Et déjà, nous dit-on ce matin, déjà ils ne le reconnaissent plus, déjà il doit se donner à reconnaître de nouveau !?
La résurrection de Jésus, sa présence de ressuscité, ça n’a de fait rien d’évident. Le reconnaître qui est là n’est pas si simple ou immédiat… Visiblement…
Vous me direz, l’expérience n’est ici pas tout à la fait la même que précédemment. Sur le chemin d’Emmaüs, nos deux disciples ont fait l’expérience de quelqu’un qui les rejoignait, quelqu’un qui les interrogeait sur ce qui leur arrivait, quelqu’un qui s’est donné à reconnaître au fil du chemin et des mots mis ensembles.
Maintenant c’est une expérience un peu différente. Il est là. C’est tout. C’est lui. On ne sait ni comment il peut être là, comment il a fait, ni comment c’est possible. Il est là. Et on peut comprendre du coup que tous soient saisis de frayeur. On entendra la même expérience et la même réaction dans l’évangile de dimanche. Et il y a de fait de quoi prendre peur, c’est quoi cette histoire !?
Il nous faut entendre vraiment ce qui leur est arrivé. Nous, nous savons, nous connaissons tout cela, mais eux : pas encore, pas vraiment, il leur faut du temps. C’est tout simplement incroyable ce qui leur arrive. Non seulement impossible à vue humaine et tellement fou !
Il est là, il est là au milieu d’eux. Comme il l’avait dit, rappelez-vous en Mt 18,20 : « Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là au milieu d’eux »… Il est là. Il est là alors même que c’est impossible et impensable. Il est là. L’expérience d’une Présence. Et une Présence qui donne la paix. Cette paix dont ils ont bien besoin vu dans quel état tout cela les met.
Et là encore, il lui faut ouvrir avec eux les Écritures, pour les faire entrer dans le mystère du réel de sa Présence qui est le mystère de sa résurrection. Le mystère de sa mort et de sa résurrection. Dans lequel nous n’aurons jamais fini d’entrer et d’avancer, même si nous connaissons l’histoire et la Bonne nouvelle. Car nous aurons toujours et encore à nous laisser façonner par cette Bonne nouvelle, nous laisser configurer. Pour en être. Pour en être vraiment.
Alors nous pourrons – et nous pouvons – être ses témoins. Témoins de sa résurrection. Pas seulement du fait que lui, Jésus, est ressuscité, mais témoins de résurrection, témoins du salut que sa résurrection vient manifester de façon particulière, sa résurrection qui est le chemin qu’il nous ouvre, mais qui est en fait déjà à l’œuvre. Car le salut c’est la vie re-suscitée, au cœur du péché quand il se fait pardon, et au cœur du mal et de la souffrance qui nous traversent quand il est guérison.
Et elle est là, je crois, la Bonne nouvelle de cette page d’évangile : le Christ nous envoie, il a besoin de nous, il nous fait cette confiance-là. C’est ce qu’on entend ces jours avec le récit du début des Actes des Apôtres : la mission de salut du Christ continue, par ceux qu’il envoie et qui parlent et agissent en son nom.
Ils deviennent et ils sont, par le don de l’Esprit Saint, Présence du ressuscité. C’est notre mission, c’est la Bonne nouvelle qui nous est adressés, c’est l’appel qui nous est fait. Et c’est bien ce que nous célébrons à chaque eucharistie où nous devenons ce que nous recevons : le Corps du Christ, le Christ présent par sa Parole qui nous façonne jour après jour et par le Pain de Vie par lequel il se fait nous, au plus intime de nous-mêmes. Amen.