17 Avril 2021
Samedi de la 2ème semaine du temps pascal
Ac 6,1-7 / Ps 32 (33) / Jn 6,16-21
Ce soir-là Jésus ne monta pas dans la barque. On peut se demander pourquoi et comment il comptait rejoindre les disciples. Ce n’est pas la question de l’auteur de cet évangile. Chez les autres on trouvera des explications, mais ici ça n’est pas la question. L’insistance se veut ailleurs, tout nous invite à nous focaliser sur l’expérience qui est vécue, pas sur les circonstances.
L’expérience, quelle est-elle ? C’est les ténèbres, c’est la tempête, tout tangue et pourrait chavirer, c’est du coup la peur et notamment la peur de la mort, c’est le non-sens d’un « que nous arrive-t-il ? va-t-on s’en sortir ? »
L’expérience c’est celle d’être rejoint par Jésus dans ce tumulte-là qui peut être celui de nos vies, celui du monde, celui de nos questionnements existentiels, spirituels et vocationnels, même après de nombreuses années d’engagement, car la vie nous ballote, nous questionne, nous fait parfois tanguer même dans ce qui nous paraissait évident ou acquis ou réglé. La vie est une traversée.
Et nous croyons qu’au cœur de cette traversée le Christ ressuscité est là, il vient. Saurons-nous le voir, l’accueillir et vouloir le faire monter dans notre barque ?
Vous aurez peut-être remarqué que ce récit est construit en partie comme celui de dimanche dernier ou celui que nous entendrons demain. Du moins c’est la même expérience, c’est comme les récits d’apparition du Ressuscité : à la fois c’est impossible, à la fois c’est la nuit de la peur ou de la désespérance, la nuit de la mort, et en même temps c’est bien lui le Christ qui vient et qui est là. C’est bien lui qui adresse une parole de Vie et de foi, un « N’ayez plus peur » qui est du même ordre que lorsqu’il dira : « La paix soit avec vous ».
Il vient et il est là au milieu d’eux. Le tumulte des ténèbres et de la tempête n’a pas prise sur lui. Il est là, il est là au milieu de nous, il vient à notre rencontre.
Et alors que les disciples veulent le faire monter dans la barque, nul besoin désormais car seul compte qu’il est là. C’est la terre ferme, on peut s’appuyer sur cette expérience, on peut s’appuyer sur lui et trouver le repos. On peut s’appuyer sur lui et l’on pourra reprendre la route, marcher humblement avec lui.
Non pas que la tempête se soit arrêtée – dans ce récit-là Jésus ne commande pas que tout se taise – et non pas que ce ne soit plus les ténèbres ou la nuit, non, mais il est là et la terre est ferme. Le Ressuscité est là, sa résurrection est notre terre promise, dès aujourd’hui et dès ici-bas.
Laissons-nous rejoindre, en déposant auprès de lui nos tempêtes et nos ténèbres, celles que nous avons chacun à traverser, de quel qu’ordre qu’elles soient, mais aussi celles du monde et celles de notre Église.
Déposons aussi nos peurs, les nôtres et celles du monde – je pense à celles que peut provoquer la pandémie mais aussi à celle bien plus effrayante du terrorisme et notamment du terrorisme islamiste – et encore nous ne sommes pas au Nigeria ou en Indonésie voire au Pakistan, pour ne citer que ces pays-là...
Déposons également auprès du Christ nos peurs liées à nos questionnements existentiels et spirituels – voire ecclésiaux, parfois –...
Déposons tout cela auprès du Christ qui vient nous rejoindre ce matin encore dans cette eucharistie, le Christ ressuscité qui vient se faire l’intime de nous-mêmes pour prendre avec nous ce qui est à porter et pour nous donner d’avancer, d’avancer dans la paix, d’avancer dans sa paix.
Qu’il soit notre force et notre refuge, notre terre ferme, au Souffle de son Esprit qui donne la vie et qui peut donc la re-susciter en nous et dans notre monde. Et que nous puissions en être témoins, témoins de sa Parole de Vie et témoins qu’au cœur de toute traversée, avec lui le Christ, un salut est donné. C’est bien ce que nous lui demandons, pour nous-mêmes, pour le monde et pour l’Église. Amen.