2 Mai 2021
5ème dimanche de Pâques – Année B
[Carmel ND de Surieu]
Ac 9,26-31 / Ps 21 (22) / 1Jn 3,18-24 / Jn 15,1-8
Est-ce que notre vie à chacun porte du fruit ? Est-ce que vos vies données et cachées, mes sœurs, sont fécondes ? Et qu’en est-il de la mienne et de mon ministère, dans son réel concret de ces derniers mois ?
On vient de l’entendre, Jésus nous dit : « Ce qui fait la gloire de mon Père, c’est que vous portiez beaucoup de fruit et que vous soyez pour moi des disciples » …
C’est l’appel, qui résume toute la page d’évangile qui nous est donnée aujourd’hui, et la 2ème lecture avec. Porter beaucoup de fruit et – c’est la suite et c’est important de les tenir ensemble – que nous soyons pour Jésus des disciples.
Quand je dis « Porter beaucoup de fruit », ce que vous n’entendez pas c’est que c’est un singulier. Il ne s’agit pas tant de faire beaucoup de choses – ce qui peut être notre pente un peu naturelle et activiste – que de porter de ce fruit dont parle Jésus. La question sera : quel est-il ? Et il ne s’agit pas tant et pas seulement de porter beaucoup de ce fruit que d’être pour lui ses disciples.
Et ce qui est frappant dans cette page d’évangile c’est d’ailleurs que ça n’est pas tant nous qui allons permettre que ça porte du fruit, que l’œuvre de Dieu en nous.
Certes, il est dit que si nous sommes des sarments qui ne portent pas de fruit – toujours au singulier – alors le Père les enlève. Et si ça porte du fruit, alors il taille pour que ça en porte d’avantage…
On voudrait faire de grandes choses de nos vies, on voudrait que notre vie ait du sens – et quand on dit ça on pense en fait à ce qu’elles soient utiles et qu’on ait le sentiment qu’elles soient utiles –, alors il arrive qu’on se donne beaucoup de mal, en tout sens.
Pareil pour l’annonce de l’Évangile et même pour notre vie spirituelle : on peut mettre beaucoup d’énergie à faire, à faire des choses, à essayer des trucs, à chercher ce qui nous correspondra et ce qui nous semblera bon et utile pour les temps qui sont les nôtres. Et pourquoi pas…
Mais entendons bien et n’oublions pas que le vigneron c’est le Père. C’est lui qui travaille la vigne. C’est son job, son job à lui. Pas le nôtre. Nous nous sommes les sarments.
Certes, si nous ne portons pas de fruit, nous allons être enlevé, dit Jésus. Donc l’enjeu c’est bien que nous en portions. Mais ce sera pour nous à la mesure de comment nous aller laisser Dieu nous travailler. Il s’agit pour nous – c’est ce qui nous est demandé, ce que nous dit Jésus – de demeurer dans le Christ et de se laisser purifier par la Parole. Et ça portera du fruit, ça portera son fruit.
Comment, quand, de quelle manière, peut-être n’est-ce plus la question, en fait. La question pour nous c’est de consentir à ce que le vigneron travaille sa vigne dont nous sommes et donc consentir à nous laisser travailler, chacun et ensemble. Et j’insiste sur le « ensemble » : car la vigne c’est le peuple de Dieu, c’est son Église que nous sommes en Christ et avec lui.
D’où l’appel à ce que nous soyons pour lui ses disciples. Ce sont les derniers mots qu’on a entendus mais c’est l’appel qui fonde tout le reste.
Être ses disciples, nous le savons, cela veut dire que nous décidons et nous acceptons de faire de Jésus le maître de notre vie et donc de nous laisser conduire par lui et par lui seul. Et pour cela à nous mettre à l’écoute de sa Parole qui va nous enseigner qui il est, qui est le Père, comment et pourquoi il se rend présent à nos vies et à quoi ça nous appelle à sa suite. Chacun et ensemble, en Eglise.
Et nous le savons, cela nous appelle et nous engage à ce « Demeurer en lui » qui n’est pas un faire des choses pour lui, mais nous tenir humblement en sa présence, apprendre jour après jour à lui faire place et à le reconnaître qui est là et qui tout-jours nous précède et nous attend.
Alors notre vie sera féconde. Féconde de ce pour quoi nous sommes faits : aimer. Aimer Dieu et nous aimer comme lui nous aime. Alors notre vie est féconde, oui, de la fécondité même de l’Amour qu’est Dieu, et de sa paix et sa joie promise.
Et si nous vivons en ce lieu-là qu’est cette fécondité d’une vie avec Dieu, alors soyons assurés, dit Jésus, qu’il répondra à nos demandes. Comment, quand, je crois que là encore ce n’est plus alors la question ; ce qui compte et qui devient force de vie c’est que Dieu demeure en nous et nous en lui et qu’il nous assure que quoi qu’il arrive – quoi qu’il nous arrive – notre vie, alors, est féconde.
L’enjeu sera de nous y aider les uns les autres, nous soutenir dans cette confiance là et donc dans l’écoute de la Parole, y compris quand elle vient nous émonder, nous déstabiliser, nous remuer. Nous soutenir et nous aider à y voir clair, discerner. Pour que notre marche soit bien en réponse à ce que Dieu semble vouloir pour nous – notre marche, qu’elle soit personnelle, communautaire ou de toute l’Eglise.
Soyons alors assurés d’être à la bonne place, celle que le Père veut pour nous aujourd’hui ; celle qui va permettre que dans la complémentarité de ce que nous sommes et de ce que nous vivons, ça porte du fruit. Pas le nôtre, mais celui de la vigne, tel que le Père le permettra.
Et si nous sommes parfois inquiets de savoir quels sont les fruits de notre vie et de tout ce que nous faisons ou rêverions de faire, y compris pour Dieu et en réponse aux appels de l’Évangile, entendons – je le redis – que le fruit que Dieu veut c’est le sien, c’est lui qui travaille nos cœurs, qu’il nous est juste demandé d’être disciples de Jésus, de vivre à son école, à son écoute, à sa suite.
Alors, dans cette eucharistie demandons la grâce de cette confiance-là. Et pour cela demandons au Christ qui veut demeurer en nous – et qui le peut par ce mystère que nous allons célébrer –, demandons au Christ la grâce de nous laisser faire – de nous donner les moyens de nous laisser faire, mais surtout de nous laisser faire –, et pour cela de nous soutenir les uns les autres.
Prions notamment pour les paroisses, que leurs membres veuillent bien, chacun et ensemble, que ce soit d’abord des lieux de rencontre et de vie fraternelle et des écoles de vie spirituelle. Et le reste, les plans pastoraux et les projets de solidarité quels qu’ils soient, tout cela est secondaire, tout cela en découlera, si Dieu veut et surtout comme il voudra, comme il nous soufflera que ça pourrait porter du fruit. Son fruit à lui.