11 Avril 2025
Aimer, être aimé… c’est la grande question existentielle de nos vies. Et ce roman vient la poser, à sa façon, au travers de la complexité du sentiment amoureux, de la passion aussi, et de ce qu’aimer peut vouloir dire dans un quotidien qui installe. Et c’est très beau, même si dans ces pages on voit combien la complexité du rapport amoureux et de ce qu’il provoque en soit peut confondre à une forme de confusion des sentiments…
C’est l’histoire de Nabile et Lamia. Nous sommes au Maroc, à Casablanca, et tous deux sont issus de familles où les valeurs familiales et de fidélité restent très importantes. Quelles furent les motivations profondes à se choisir et se donner, ce n’est plus la question. Ils s’aiment et apprennent à s’aimer.
Sauf que la passion amoureuse pourrait venir bousculer leurs équilibres ; et va même les faire voler en éclat…
Que s’est-il passé pour chacun d’eux, et que s’est-il joué entre eux ? On va le découvrir au fil des chapitres, et découvrir que rien n’est jamais tout simple, y compris pour celui qui a pourtant été voir ailleurs. Et que le sentiment amoureux peut être là encore, en fait, même quand on a posé des choix qui semblent le mettre en jugement.
Et d’ailleurs, peut-on aimer plusieurs personnes en même temps, se demanderont-ils l’un puis l’autre, les aimer peut-être différemment, et qu’en faire alors, qu’est-ce qui sera chemin de vie, réellement, à long terme ? Avec cette autre question que cela pose et que viennent en fait poser ces pages : qu’est-ce qu’aimer ?
Voilà les questions qui vont traverser nos personnages, les travailler aussi, sans forcément qu’ils arrivent d’ailleurs à les mettre vraiment en mots ou à le vouloir, voire le pouvoir… Il va falloir du temps… Et c’est ça qui est beau en ces pages, c’est de voir le travail du temps, et ce qu’il vient peu à peu mettre en lumière… Après, il faudra vivre avec…
Concrètement, après avoir posé le décor et le contexte de l’histoire, nous allons suivre chacun des deux personnages principaux, Nabile et Lamia, en leur histoire, celle de leur couple et celle de leur vie de famille, puis celle de cette séparation et de ce qu’on ils en feront chacun, comment ils s’en relèveront chacun ou comment ils essayeront de se reconstruire…
J’ai aimé, au final, même si j’avoue que j’ai eu un peu de mal par moments, me demandant où tout cela nous emmenait, quel était le but à ces pages. Mais au final, oui j’ai aimé, c’est intéressant. Et en plus, il faut bien le dire, c’est globalement plutôt agréable à lire, c’est plutôt bien écrit, même si je me suis demandé, une fois ou l’autre, si le scénario était complètement bien ficelé, s’il n’y avait pas, à l’un ou l’autre endroit, une légère incohérence de récit entre ce qu’on raconte de leur vie de couple et ce qui en est partagé ensuite par l’un ou l’autre – mais peut-être cela dit-il une part du réel : que l’on montre bien ou que l’on dit bien à l’autre ce que l’on veut de ce qui se joue pour nous ou en nous, et qu’en même temps on se rappelle bien aussi de ce qui nous arrange quand on se re-raconte notre propre histoire ?
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Tahar Ben Jelloun, Les amants de Casablanca, folio, mars 2025 (Gallimard 2023), 334 pages (format poche).