9 Octobre 2017
Lundi de la 27ème semaine du Temps Ordinaire
Jon 1,1 – 2,1.11 / Ct de Jon 2,2-8 / Luc 10,25-37
Le cantique de Jonas que nous avons entendu en réponse à la 1ère lecture pourrait être celui du blessé de la parabole du samaritain, et plus largement de celles et ceux, autour de nous, qui souffrent, celles et ceux qui sont comme le blessé de notre évangile, qui sont cloués au sol par la vie, par le mal et le péché qui entraîne la violence des hommes, celles et ceux qui sont parfois incapables de se relever, d’avancer.
Parmi eux, certains crient encore vers le Seigneur, comme Jonas, mais d’autres, nous en connaissons peut-être, n’ont même plus cette force là ni cette espérance là. Ils restent là au bord du chemin. Et le cri qui leur viendrait, s’ils osaient malgré tout crier encore vers le Seigneur, ce serait plutôt celui du Ps 21, celui de Jésus sur la croix : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné »…
Ce cantique de Jonas, qui est encore prière de qui se tourne encore vers Dieu, il dit non seulement la souffrance et la douleur – « les flots m’ont cerné, (...) les vagues ont versé sur moi » crie Jonas – mais aussi l’expérience ou plutôt le sentiment d’éloignement ou d'abandon de Dieu : « Me voici rejeté de devant tes yeux » dit Jonas. C’est aussi l’expérience ou le sentiment, parfois, de celles et ceux qui entourent celui qui souffre, comme dans ce psaume où nous chantons avec eux « Où est-il ton Dieu ? », comme les amis de Job ou encore comme celles et ceux qui au pied de la croix disent à Jésus : « Si tu es le Fils de Dieu, sauve-toi toi-même »…
Et nous le savons, nous le croyons, et nous le célébrons : le Seigneur sauve. C’est promesse dans le Christ, dans le mystère de sa mort et de sa résurrection, c’est promesse dans le Christ déjà annoncée notamment dans cette histoire que nous avons entendue de Jonas qui séjourne dans le ventre du grand poisson, perdu au fond des mers.
Oui, Dieu sauve, c’est promesse. Oui, nous serons sauvés au dernier jour, ressuscités en vie éternelle, mais nous sommes déjà en promesse de salut qui se réalise, nous sommes déjà en acte de résurrection, en vie re-suscitée, quand un frère ou une sœur en humanité s'approche et prend soin, vivant concrètement, parfois sans en avoir conscience – sans en avoir une conscience de foi –, vivant concrètement l’appel d’évangile à être et à « devenir miséricordieux comme le Père est miséricordieux »…
À d’autres moments, comme Jonas, c’est dans la prière apaisante que nous sera donné de goûter cette expérience de salut, de résurrection, de vie qui nous traverse, quand il nous est donné cette confiance qui fait dire à Jonas : « j’appelle et toi tu écoutes ma voix » ; Jonas qui ajoutait en finale de son cantique: « Quand mon âme en moi défaillait, je me souvins du Seigneur ; et ma prière parvint jusqu'à toi. »
Au cœur de cette eucharistie, faisons mémoire : quelles ont été peut-être, chacun de nous, nos expériences de salut ?
Pour le dire autrement : Quand le Seigneur, un jour, nous a-t-il visité, que nous ayons conscience ou non, spontanément, qu’il était là ; quand le Seigneur nous a-t-il visité un jour, par un frère ou une sœur en humanité qui a pris soin de nous ou qui a trouvé les paroles de confiance et d’espérance dont nous avions besoin ; et quand le Seigneur nous a-t-il visité par la délicatesse apaisante de son souffle de vie que oui avons peut-être ressenti dans le silence du cœur ou dans le tumulte intérieur qui nous habitait ?
Faire mémoire pour rendre grâce, pour rendre grâce de cela. Mais aussi pour demander la grâce de vivre en ressuscités qui sont alors des ressuscitants pour d'autres, comme le samaritain de l’évangile, des ressuscitants pour celles et ceux que nous croisons ou que nous croiseront, qui crient ou qui ne le peuvent plus, mais qui ont besoin d'être soignés, écoutés, consolés, relevés…
Oui, dans cette eucharistie, demander la grâce de devenir, comme le dira la prière après la communion, de devenir ce que nous recevons, le Corps du Christ, présence de Dieu en ce monde ; demander la grâce d'être et de devenir toujours plus ou toujours mieux miséricordieux comme le Père est miséricordieux, c’est-à-dire être et devenir les uns pour les autres ces mains du Père qui prennent soin et sa voix et sa présence d’amour qui consolent, qui pardonnent, et qui redonnent espérance.