10 Mars 2016
[Quelques lignes de réflexion que j'ai écrites pour publication dans le bulletin de mars 2016 de ma paroisse St François d'Assise...]
C'était beau, c'était un samedi après-midi de décembre, il y a un an ou deux... Un temps de paix, vraiment. Prière, beaux chants, écoute de la Parole, médiation, re-chants, et re-prière. Et au coeur de cela, le sacrement de la réconciliation, pour ceux qui voulaient.
C'était beau, pour nous prêtres, dans cette confiance de ce qui était déposé au Seigneur, dans cette mise en mots par nous adressée. C'était vraiment beau de foi.
Sauf que certains avaient trouvé qu'il n'y avait que (ou presque seulement) des têtes blanches (comme la leur) et ont dit en sortant que les jeunes pourraient venir eux aussi, que eux les plus "vieux" c'est plus pareil ce qu'ils ont à confier au Seigneur, qu'il n'ont plus tant besoin que ça... Plus pareil ? que quoi ? Moins besoin parce que la vie les auraient assagis ? Si "se confesser", comme ils disent, c'est humblement et patiemment reconnaître nos manquements à l'appel à aimer, jusque dans les toutes petites choses du quotidien, nos difficultés de toute sorte à aimer l'autre quel qu'il soit, à s'aimer tel que l'on est vraiment et pas tel que l'on se rêverait, et à aimer Dieu jusqu'à vouloir prendre soin, résolument de sa présence en soi et dans ce monde, si "se confesser" c'est aussi, en même temps, redire et reconnaître l'amour de Dieu pour nous, alors nous en avons besoin pour toute notre vie ! Et patiemment Dieu sera là pour nous accueillir, nous entendre et nous écouter par son ministre, et souffler ainsi à chacun de nous : "Je t'aime, tu as du prix à mes yeux, je peux te donner ma force de vie et d'amour, ma paix ; viens à moi, n'hésite pas..."
Ceci dit, ils avaient raison ces plus "vieux" qui étaient là (eux) : les autres, où étaient-ils ? Nos églises devraient être pleines pour ces temps de prière communautaire où nous célébrons et chantons le Dieu miséricordieux et où nous nous portons mutuellement dans la prière ! Nous devrions être là, nombreux, même si nous ne voulons pas vivre une démarche personnelle de confession, pour soi. Être là, tous, pour faire grandir entre nous la vie, l'amour, le pardon, qui viennent de Dieu lui-même. Confesser cela ensemble, le chanter et le célébrer !
Mais c'est vrai, certains ne viennent pas car ils ne comprennent pas pourquoi il faudrait recevoir de pardon de Dieu par l'intermédiaire d'un prêtre... Pourquoi ? Mais tout simplement pour signifier concrètement notre désir d'aller à Dieu, de revenir à lui ; le ministère du prêtre c'est de re-présenter (rendre présent) Celui qui est là mais que nos yeux ne voient pas. Tout simplement. Tout simplement aussi parce que le prêtre c'est un frère, pécheur lui aussi (et donc qui ne juge pas), qui va porter dans sa prière ce qui sera partagé (c'est son boulot). Et tout simplement encore car il peut aussi nous éclairer par la Parole de Dieu, au nom du Christ, et par son expérience d'écoute.
Ok, mais que lui dire ? Faut-il tout lui dire ? J'ai envie de retourner la question ou plutôt la pousser plus loin... "Tout" quoi ? Réponse spontanée : surtout pas ! on en aurait pour une nuit pour chacun ! car si je regarde en vérité ma vie, si je regarde en vérité tous mes petits manquements (et moins petits) à l'appel à aimer, je vais vite voir que c'est tellement difficile d'y arriver vraiment ou même de le vouloir ! Et quand je dis cela ce n'est pas pour nous enfoncer ou nous culpabiliser, non, car justement Dieu nous prend comme on est, avec amour, dans cette confiance que nous ne sommes pas que ces incapacités à aimer et qu'avec lui, petit à petit, nos coeurs se transforment et que pour le reste nous allons avec lui apprendre à nous aimer comme nous sommes, avec nos travers, mais que nous pourrons toujours et prendrons toujours plus conscience que son amour pour nous est un moteur pour avancer dans cet humble quotidien de nos jours.
Alors faut-il tout dire ? Plus sérieusement, déposons au Seigneur, par le prêtre qui est là, ce qui nous préoccupe, ce qui encombre notre coeur, ce qui est de l'ordre du mal que nous avons pu faire. C'est tout. Et si certaines choses sont encore trop dures à dire, alors ayons déjà conscience de cela, ayons conscience de pourquoi nous n'arrivons pas à les dire. C'est déjà nommer ; et c'est déjà important, car nommer c'est entrer sur un chemin de libération. Et un jour nous pourrons nommer à un autre, le lui déposer, nous décharger et du coup guérir vraiment (ce que nous ont réappris la psychanalyse et la psychologie : mettre en mots, verbaliser, faire advenir à la parole, c'est se libérer, c'est guérir).
En tout cas (je reviens à cet après-midi de décembre, il y a un an ou deux), c'était vraiment beau. Et ce que j'aimerais que ces propos-souvenirs suggèrent, c'est qu'ils nous aident à prendre conscience qu'on aurait tord, vraiment, de se priver de ce qui est vécu dans ce sacrement du pardon et ces célébrations communautaires de la miséricorde de Dieu... Vraiment...