9 Décembre 2019
Solennité de l’Immaculée conception de la Vierge Marie [*]
Paroisse St Joseph – « Isèreanybody? » Grenoble
Gn 3,9-15.20 / Ps 97 (98) / Ep 1,3)6.11-12 / Lc 1,26-38
Les textes de ce jour nous donnent de faire mémoire de deux étapes clés de l’histoire de notre humanité et de la liberté de l’homme, ce qu’on appelle la chute – c’est la 1ère lecture – et le mystère de notre rédemption par le Christ Jésus et son incarnation – ce qui nous est donné à entendre à la fois dans la 2ème lecture et avec cette page d’évangile.
Et fêter aujourd’hui l’Immaculée Conception de la Vierge Marie, la fêter en la contemplant au cœur de ce double mouvement de l’histoire de notre humanité, c’est fêter le salut, c’est fêter la victoire du Christ sur le péché du monde. C’est bien ce que nous sommes invités à chanter avec le psaume : oui, par sa venue, le Seigneur fait connaître sa victoire, il révèle sa justice aux nations et il accomplit ainsi ses promesses, il est fidèle et tout aimant, acclamons-le, chantons-le avec Marie.
Car nous fêtons le salut, nous fêtons cette victoire du Christ rendue possible par sa venue, elle-même rendue possible par ce oui de Marie qui nous est donné aujourd’hui à réentendre. Et voilà que cette journée s’éclaire de ce que j’ai envie d’appeler un avant-goût de Noël – jusque dans le chant du Gloria qu’on tait normalement pendant l’Avent car c’est le chant des anges à Noël ! Oui, cette journée s’éclaire donc de ce que j’appelle un avant-goût de Noël car avec Marie, nous voilà invités à accueillir le Christ qui vient. Au cœur du réel de notre humanité blessée par le mal et le péché.
En faisant mémoire de la chute des origines, de ce péché inscrit en notre humanité et rappelé par la 1ère lecture, il nous est donné de comprendre que : de même que le péché est entré dans le monde par la faute des hommes, en raison de la tromperie du mal qui se glisse et se faufile en toute vie et et qui conduit l'humanité libre à la désobéissance à Dieu, cette humanité figurée par Adam et Ève, c’est-à-dire tout homme et toute femme, tout vivant, eh bien de même le salut advient, le salut entre dans ce monde par un homme, l’homme par excellence, l’homme dans sa destinée finale, pleine et entière, le Christ, celui qui est le premier des vivants dans le cœur de Dieu et dans son être même, le Christ qui est en sa personne le salut promis par Dieu, ce salut qui peut advenir par le oui de Marie qui devient ainsi Mère de l’humanité sauvée, Mère de l’humanité promise au salut. Marie qui devient, qui est, la Nouvelle Ève, la Mère des vivants.
Voilà ce que nous fêtons, pour une part, et que nous sommes invités à contempler dans ces textes que la liturgie nous propose. Appel à rendre grâce avec Marie pour le Christ en son salut. Le voilà le cadeau de Noël que Dieu veut nous faire : le Christ, le Christ qui vient et qui veut illuminer notre vie de sa Présence et de l’amour et la fidélité aimante du Père pour notre humanité qui pourtant se détourne de lui, le Père qui nous appelle malgré tout à illuminer ce monde, à notre mesure, par nos oui de chaque jour à sa Parole et à ses appels.
Et Marie, que nous confessons immaculée en sa conception, c’est-à-dire conçue sans péché, c’est-à-dire tout-aimante et vivant tout en Dieu et avec lui, Marie est en même temps et pour cela celle que nous confessons et reconnaissons qui enfante le sans-péché, celui qui est le seul qui soit sans-péché, avec cette part de divinité inscrite en nous que nous avons perdu du projet de Dieu pour nous et vers quoi nous marchons en apprenant à accueillir le salut et en voulant en vivre.
Jésus est le sans-péché car il est Dieu, il est l’incarnation de l’amour, il est en communion parfaite avec Dieu notre Père, dans la réciprocité de l’amour qu’est l’Esprit Saint. Et c’est cet amour dont il témoignera en paroles et en actes, pour que nous en vivions et qu’il rayonne et se répande en ce monde.
Cela peut advenir car Marie accueille la parole de l’ange, la parole que Dieu lui adresse. Elle est, dit-il, comblée de grâce. C’est à la fois une annonce que lui fait l’ange, mais c’est en même temps son être même, tel que Dieu l’a préparée pour cette belle et grande mission qui devient la sienne. Elle est la toute-comblée-de-grâce, celle que Dieu s’est préparée, exempt elle aussi du péché, comme par avance, par anticipation, préparée par avance tel un écrin précieux pour le plus précieux des cadeaux qu’est Dieu lui-même qui vient à nous, Dieu qui vient naître en ce monde, Dieu qui vient offrir son salut.
Et voilà que Marie est comblée de grâce jusqu’en ce oui sauveur, ce oui qui permet à la Parole de prendre chair en elle. Elle devient comme un tabernacle d’humanité, habitée qu’elle est de Dieu lui-même qui veut s’incarner en notre condition pécheresse et mortelle. C’est bien ce que nous nous apprêtons à fêter dans quelques jours, à Noël, c’est bien ce que nous célébrons déjà en ce temps de l’Avent.
Alors contempler Marie dans cet accueil du Christ en elle, du Christ en germe qui ne demande qu’à naître en ce monde et y être accueilli pour que le salut advienne, pour que la vie plus forte que tout mal et que toute mort soit annoncée, contempler Marie en son oui, c’est contempler ce que nous sommes appelés à vivre, à la suite du Christ et comme elle. C’est contempler notre oui aux appels de Dieu qui permettra à la Parole entendue et proclamée de prendre chair en nous, en notre vie, pour être portée au monde et que le Christ, aujourd’hui encore, y soit révélé, enfanté.
Contempler Marie, l’Immaculée conception, contempler Marie, nous qui sommes pécheurs, nous qui ne savons pas toujours aimer et même, parfois, qui ne voulons pas aimer et pardonner et qui parfois nous détournons de Dieu et de ses appels, contempler Marie en son immaculée conception, c’est comprendre alors à quoi nous sommes appelés, c’est comprendre quel chemin s’ouvre pour nous, quel chemin le Christ veut nous ouvrir avec elle, c’est comprendre à quoi nous sommes appelés par nos oui à venir à l’Évangile et au Christ, appelés à la résurrection, à la vie éternelle, appelés à la vie même de Dieu, dans son amour, appelés au salut qu’est le Christ, appelés à être tout en lui, pleinement, à être tout en Dieu, dans l’amour du Père pour son Fils qu’est l’Esprit Saint.
Marie est celle qui a cru, elle est comblée de grâce. Marie est celle qui a osé le pas de la confiance en osant son oui à l’appel de Dieu. Marie est celle que nous chantons aujourd’hui avec le Christ et par qui, avec qui, nous chantons et nous pourrons chanter en vie éternelle la victoire de la Vie – la vie avec Dieu et de Dieu – la victoire de la Vie sur tout mal et sur tout chemin de mort.
Avec Marie, demandons au Seigneur de savoir nous aussi et toujours mieux répondre à ses appels. Demandons-lui aussi d’apprendre avec elle la confiance, quoi qu’il nous arrive, et de vouloir et de pouvoir ainsi vivre déjà et pleinement en dynamique d’espérance et de résurrection.
Et pour cela, accueillons comme Marie ce mystère de notre salut que nous célébrons dans cette eucharistie, reconnaissons que Dieu nous parle et qu’il est là en sa Parole qui va prendre chair en nous. Accueillons en nous et en notre vie ce mystère de la présence indicible de Dieu que nous célébrons dans cette eucharistie et à chaque eucharistie, chaque eucharistie où Dieu veut nous parler et prendre toute place en nous, à la fois en chacun de nous et en même temps dans ce nous, cette communion, que nous devenons ensemble, ce nous, cette communion, que nous devenons en lui le Christ, lui qui devient chair de notre chair, comme il a pris chair en Marie sa Mère et notre Mère.
Alors, en nous approchant pour communier, qu’il nous soit donné de vraiment accueillir le Christ qui est là et qui a besoin de nous pour être présent à ce monde et pour être donné à ce monde, le Christ et son salut. Qu’il nous soit donné de l’accueillir vraiment dans la foi et de le reconnaître présent en nous et au milieu de nous. Et que nous acceptions vraiment, et le lui demandions, qu’il vienne éclairer ainsi les nuits de nos vies et de notre humanité, et qu’il nous donne de pouvoir à notre mesure illuminer ce monde, l’illuminer de notre foi en sa Présence à lui, le Christ, l’illuminer de notre foi en son Amour, l’amour du Père que Jésus nous révèle, et illuminer ce monde de notre confiance en la Vie, le vie de Dieu et avec Dieu qui est plus forte que toute nuit du mal et de la mort.
Je prie pour qu’avec Marie nous nous laissions renouveler dans cette foi là et dans ce salut auquel le Christ veut nous rendre participants. Amen.
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[*] Cette année la fête de l’Immaculée conception de la Vierge Marie est célébrée le 9 décembre et non pas le 8 comme habituellement, car le 8 tombant un dimanche, en l’occurence le 2ème dimanche de l’Avent, celui-ci primait. L’Eglise décale alors cette fête au lendemain, ce lundi 9 décembre 2019, celle-ci commençant toutefois à être célébrée dès la veille au soir, après les 1ères vêpres, comme toute solennité.
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L’illustration de cette publication est une peinture sur bois de Tony Castro (communauté catholique brésilienne Reine de la Paix, actuellement implantée en France dans le diocèse de Grenoble-Vienne, à Bourgoin-Jallieu).