Funérailles de mon grand-père

 

Funérailles de Papi (Jacques Delaigue - 92 ans) / Bourg Argental (42), 16 avril 2012

[1Th 4,13-14.17d-18 / Ps 129 (130) / Lc 12,38-38.40]

 

Je dois vous avouer que ce matin, j’ai eu un peu de mal à préparer ces quelques lignes… Notamment, c’est toujours une question pour moi de savoir comment nous recevons ces textes, les uns et les autres. Il est vrai que je ne sais pas grand-chose de votre foi ni de vos questions ou de vos doutes. Je ne sais d’ailleurs pas grand-chose non plus de la foi qui habitait mon grand-père. Je sais juste, comme vous, que la mort reste, quoi qu’il arrive, une question, pour vous comme pour moi. Et que même dans la Bible, et donc pour la foi chrétienne, elle reste une question aussi.

A la suite de Jésus, dont nous avons fêté la résurrection dimanche dernier, St Paul a cette assurance que nous avons entendue dans la 1ère lecture que la mort n’est pas la fin de tout. Nous le savons bien, d’ailleurs, si nous voulons bien y regarder de plus près : quoi qu’il arrive, la mort n’efface pas ce qui a été vécu, et quoi qu’il arrive toute vie donnée et tout amour vécu jusqu’au bout sont toujours plus forts que tout mal et que toute mort. L’espérance en la résurrection est bien de cet ordre là. Certes, nous allons mourir – certes Papi est mort – mais est-ce la fin de toute vie et de toute présence pour autant ? La question se pose depuis des milliers d’années et dans toutes les civilisations ont fait ce constat d’une espérance qui reste plus forte que la vie ne soit pas détruite complètement par la mort. La mort comme passage pour une autre présence. Mystérieuse, c’est vrai, improuvable, c’est vrai aussi, mais de l’ordre de la foi, c’est-à-dire d’une confiance et d’une espérance.

Si nous sommes chrétiens, nous croyons que Jésus est ressuscité. Il est bien mort, comme nous ; et il a souffert, comme nous. Mais Dieu nous ouvre par sa mort et sa résurrection un passage. Si Dieu existe – ce que je crois – et si Dieu est vraiment Dieu, alors il peut très bien ressusciter son Fils, Jésus. Et si Dieu est bien celui dont nous parle Jésus, celui qui voudrait sauver tous les hommes, s’ils veulent bien se laisser rejoindre par lui et accueillir par lui, alors la résurrection n’est pas de l’ordre de l’impossible pour nous non plus. Et c’est bien ce que nous célébrons cet après-midi.

Pour moi, c’est vraiment de l’ordre de cette espérance là, dans la confiance, du coup, que si Jésus est ressuscité et mystérieusement présent à nos côtés, comme il nous l’a promis, alors nous pouvons lui ouvrir notre cœur et lui confier notre tristesse comme nos questions. Je pense à cette phrase qu’il a dans l’évangile de Matthieu : « Venez à moi vous tous qui peinez, je vous donnerai le repos », la paix du cœur. C’est bien ce que nous sommes invités à vivre avec cette célébration.

Mais la résurrection, cette promesse de résurrection qui nous est faite, c’est aussi pour moi un appel. Un appel qui rejoint ce texte d’évangile que nous venons d’entendre. Mort et ressuscité, Jésus n’a peut-être pas d’autre mode de présence aujourd’hui que ce que nous sommes, ouverts à son Esprit Saint, sa force de vie et d’amour qu’il offre à qui veut bien la lui demander. Je dis souvent que nous sommes aujourd’hui les mains par lesquelles Dieu peut prendre soin de notre monde et les voix par lesquelles il peut être annoncé mais plus encore par lesquelles des paroles de vie et de consolation peuvent être prononcées. « Restez en tenue de service » a dit l’évangile. A la veille de sa mort, Jésus a invité ses disciples à prendre la tenue de service ; servir c’est se mettre à la hauteur de l’autre pour écouter et entendre ce dont il a besoin, pour le regarder avec des yeux et un cœur qui ne jugent pas mais qui gardent confiance qu’en chacun, quoi qu’il arrive, il y a une parcelle de bon et de beau à révéler et à faire grandir.

Peut-être que nous ne savons pas trop qui est Dieu ni s’il existe. Mais c’est appel à aimer et à prendre soin, nous pouvons déjà le mettre en pratique, et ça c’est bien du côté de la vie. Je le disais tout à l’heure, je ne sais pas plus que cela qu’elle fut la foi de mon grand-père, mais ce que je sais c’est qu’il a pris toute sa vie et tant qu’il a pu la tenue de service dont parle l’évangile et qu’il s’est donné sans compter notamment comme médecin.

Je prie aujourd’hui pour que Dieu l’accueille auprès de lui, évidemment. Mais plus encore je prie pour vous ; je prie pour que nous osions faire, chacun, ce pari de confiance en la résurrection, et que nous osions même demander au Christ cette paix du cœur qu’il nous promet. Alors nous pourrons continuer à vivre et à avancer et nous pourrons à notre tour rester en tenue de service.

Nous prenons quelques instants de silence, en musique, pour laisser résonner tout cela en nous et pour oser ce pari de confiance en Dieu et en sa présence consolatrice, lui qui veut pour chacun de nous la paix du cœur.

 

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