31 Août 2013
Samedi 31 août 2013 / Le Touvet / Messe d’action de grâce et d’au-revoir aux communautés paroissiales du doyenné
Ex 16,2-4.12-15 / Ps 15 (16) / Ep 4,30 – 5,2 / Jn 13,1-15
Pourquoi avoir choisi ces textes là ? Comment est-ce qu’ils viennent éclairer ce que nous célébrons et qu’est-ce qu’ils viennent nous redire, nous rappeler, de ce qui me tient à cœur et que j’aimerai vous laisser en héritage, comme une exhortation pour ce chemin que nous avons à continuer, autrement ?
Il me semble que ce soir nous sommes un peu dans la même situation que les disciples au soir du Dernier repas. Certes je ne passe pas de ce monde au Père et nous ne célébrons pas votre passage de l’esclavage à la liberté. Mais comme Jésus et les disciples, et comme le peuple d’Israël, nous vivons un passage, on pourrait dire une Pâque, ce même passage – cette même Pâque – qui est au cœur de notre foi et au cœur de l’eucharistie dont vous savez combien elle est le fondement de ma vie.
Ce passage, il est difficile pour certains d’entre nous, je le sais. Et nous connaissons le dicton qui s’appliquerait bien aux disciples et même au peuple d’Israël : « Partir c’est mourir un peu ». Ce passage il est à vivre avec ce que nous portons les uns et les autres d’histoire personnelle et ecclésiale, avec ce petit bout de chemin que nous avons fait ensemble et qui aujourd’hui arrive à un croisement. Ce passage, nous sommes appelés à le vivre dans cette confiance dont il est question dans la 1ère lecture que nous avons entendue, cette confiance qui m’habite vraiment et qui guide même ma façon d’appréhender et d’envisager l’avenir de nos communautés dans une Eglise où nous ne cessons de déplorer le manque de prêtres : cette confiance que Dieu nous donne ce dont nous avons besoin aujourd’hui. Certes ça pourrait être autrement, ça pourrait être comme avant, dans ce passé que parfois nous idéalisons comme le peuple d’Israël qui semble avoir oublié qu’en Egypte c’était d’abord et avant tout l’esclavage et la mise à mort des enfants d’Israël…
Nous avons ce dont nous avons besoin, Dieu nous donnera encore ce dont nous avons besoin, parce que Dieu est fidèle et il est ce compagnon de route sur qui nous pouvons nous appuyer, celui sur qui il nous faut nous appuyer, celui qu’il nous faut invoquer, celui qui est quelqu’un qui est là, à la mesure de la place que nous décidons de lui faire. Certes ce ne sera jamais comme avant, certes nous avons parfois du mal à voir qu’elle sera la suite – je parle de l’avenir de nos communautés –, mais la Bonne Nouvelle que nous célébrons et qui doit être le guide de notre vie, c’est que quoi qu’il arrive, avec le Christ la vie et le don de soi par amour jusqu’au bout sont vainqueurs, vainqueurs de nos peurs et de nos ténèbres, vainqueurs aussi de tout mal et de toute mort. Et que sur le chemin, nous ne serons jamais seul : le Christ se donne à nous par sa Parole qui peut nous éclairer si nous la prions et si nous la partageons, il se donne à nous aussi par le Pain de la Vie où il se rend présent à notre vie-même, et il se donne à nous par son Esprit Saint à l’œuvre en nous quand nous le prions et à l’œuvre au travers de tant d’évènements et de rencontres qui sont de l’ordre de la vie qui nous traverse et de ces relèvements, ces résurrections qui nous sont données.
Nous ne sommes pas seuls non plus parce qu’il nous est donné des frères et des sœurs en Christ avec qui partager et avancer. Je l’ai dit souvent mais je veux le redire encore ce soir : nous avons besoin les uns de autres pour devenir nous-mêmes, nous avons besoin de nous soutenir dans notre vie quotidienne et notre vie de foi pour devenir toujours plus et toujours mieux ces témoins en actes de l’évangile dont notre monde, je crois, à tellement besoin, parce qu’il est Parole de Vie qui peut relever et remettre en route ceux que la vie laisse au bord du chemin.
Cette mission c’est celle que Jésus confie à ses disciples de façon étonnante et surprenante au soir du Dernier repas, au soir du Lavement des pieds. Nous sommes appelés à nous faire serviteur de l’autre, quel qu’il soit, quelle que soit son histoire, quelle que soit sa foi, et même quel que soit le mal qu’il fasse ou qu’il ait pu me faire. Servir l’autre, aimer chacun, croire que l’autre qui qu’il soit a quelque chose de bon et de beau en lui, même très enfoui peut-être, croire que chacun est aimé de Dieu et même que chacun qui va croiser ma route pourrait être une visite de Dieu dans ma vie.
Cela, nous avons à le vivre entre nous déjà, dans et entre nos communautés ; ça restera toujours un défi même si nous progressons. Nous avons à le vivre entre nous pour que notre témoignage soit crédible mais aussi pour que nous nous aidions à vivre cela autour de nous, dans le quotidien des jours et des rencontres. D’où les appels de St Paul dans la 2ème lecture que je voulais vous partager. Car servir l’autre, aimer à la suite de Jésus, c’est concret, ça ne peut pas être que des mots ou des belles paroles. Comme dit Jean Vanier, il ne suffit pas de dire aux gens que Dieu les aime, il nous faut les aimer concrètement au nom de Jésus et de l’évangile. Rappelez-vous d’ailleurs ce verset de St Jean que j’ai souvent cité, Jésus qui nous dit : « C’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres que l’on reconnaîtra que vous êtes mes disciples »…
Alors ce soir je rends grâce pour ce que nous arrivons déjà à vivre de tout cela et pour tout ce que nous avons appris à en vivre ensemble depuis 8 ans dans ce doyenné et notamment depuis 6 ans sur la paroisse Ste Thérèse. Je rends grâce de ce que nous ayons pu le vivre aussi, concrètement, entre prêtres, dans cette vie fraternelle et commune que nous avons essayé de construire ensemble et de vivre, non pas pour nous mettre à part comme certains le craignaient au début, mais au contraire pour mieux vous servir en pouvant partager entre nous nos joies et nos peines, nos questions et nos difficultés, mais aussi nos actions de grâces.
Alors ce soir, oui, je rends grâce, au cœur même de ce passage que j’ai à vivre et que vous avez à vivre. Je vous confie chacun au Seigneur, ainsi que tout ceux qui ne sont pas là, je confie Philippe et Thibault ainsi que Serge et Francis, je confie Michel qui prend le relais, je confie vos communautés et vos paroisses dans leur diversité qui sont appelées à devenir toujours plus des richesses complémentaires à partager plutôt que des options concurrentielles ; je demande au Seigneur que sa présence soit notre roc sur le chemin que nous avons à vivre, dans cette confiance pour l’avenir qu’il nous donne déjà ce dont nous avons besoin aujourd’hui, ce dont nous avons besoin qu’il nous faut peut-être discerner, en tout cas accueillir.