Homélie dimanche 13 décembre 2015

3ème dim. de l’Avent / Année C

Abbatiale de St Chef

So 3,14-18a / Is 12,2.4b-e.5b-6 / Ph 4,4-7 / Lc 3,10-18

Dans ce qu’on vient d’entendre dans ces lectures, il a y comme deux thèmes : l’appel à la joie, d’abord, et ce leitmotiv de l’évangile : « Que devons-nous faire ? »

La joie… C’est ce qui marque fortement la 1ère lecture, mais aussi le Cantique d’Isaïe qu’on a entendu juste après, et la 2ème lecture. C’est vraiment très présent ce matin, dans ces textes, et je me disais que c’est peut-être dur à entendre pour certains d’entre nous, au regard peut-être de ce que vous traversez d’épreuve ou de souffrance… On veut bien être dans la joie, ok, mais ça ne se commande pas comme ça ! C’est vrai… Et en même temps peut-être que ça fait du bien de l’entendre ? La Bonne Nouvelle qui nous est annoncée et pour laquelle nous devons nous réjouir, c’est que malgré ce qui nous tombe dessus, malgré ce qui est trop lourd à porter, nous pouvons être dans la joie quand même. Une joie nous est promise et peut être réelle. Car le Seigneur est là avec nous, il ne nous abandonne pas, et il peut porter avec nous ce qui a besoin de l’être. Il nous faut juste lui faire cette confiance là et surtout vouloir lui faire une place et l’accueillir dans notre vie. Alors un bonheur sera envisageable avec lui…

L’évangile nous parle justement de cet accueil auquel nous sommes invités. Jean-Baptiste attirait à lui beaucoup de monde, des foules, qui attendaient le Sauveur promis, celui que Dieu devait envoyer. Jean-Baptiste, sans doute qu’il parle bien, du coup tous affluent vers lui. Sauf qu’il n’est pas ce Libérateur qui doit venir ; il est celui qui prépare son chemin.

Toutes ces personnes qui viennent jusqu’à lui veulent savoir ce qu’elles doivent faire pour être sauvées ; c’est cette question répétée à plusieurs reprises : « Que devons-nous faire ? » Je ne sais pas ce qu’ont compris ses auditeurs – ses propos sont un peu mystérieux – ; ce que je sais c’est que cette question est vraiment actuelle. Nous sommes dans une époque où il me semble que nous n’arrêtons pas de vouloir faire des choses ; nous cherchons que faire pour trouver le bonheur, pour être heureux, pour que la vie ait un sens. Nous sommes très souvent dans le faire…

Peut-être même que nous nous posons cette question pour ce temps de l’Avent : préparer nos cœurs à Noël, accueillir le mystère, le sens, de Noël, ok ; mais que devons-nous faire, comment faire ? Pour vous dire vrai, je serais un peu rassuré qu’on se pose cette question plutôt que de subir la frénésie du quotidien et ne même plus penser ou trouver le temps de se demander comment on va arriver à Noël, comment on va s’y préparer un peu !

Je reviens à l’évangile. La réponse de Jean-Baptiste a de quoi surprendre. En gros il dit : faites déjà ce que vous avez à faire, ni plus ni moins ; soyez et restez à votre place. Il ne dit pas qu’il n’y a rien à faire mais il faut le faire de façon juste, de façon ajustée non seulement à la situation mais à qui nous sommes. Ceci dit, si on y regarde de près, Jean-Baptiste parle de 4 « niveaux » d’actions – qui ne sont pas choisis au hasard – : deux concernent les besoins élémentaires à la dignité de l’homme – se nourrir et être vêtu – et deux autres concernent notre soif d’argent et de pouvoir sur les autres (notamment par la violence). Il nous faut faire ce que nous pouvons, tout ce que nous pouvons, à notre mesure mais toute notre mesure, pour qu’autour de nous l’homme soit respecté dans sa dignité et pour que les uns ne fassent pas du profit sur le dos des autres ; et qu’ils n’exercent pas une pression qui oppresse la liberté. C’est ce que nous dit Jean-Baptiste.

Du coup c’est une invitation à regarder autour de soi ce qui se passe ; regarder la société en vérité et notre propre vie en vérité ! Je pense notamment à deux questions d’actualité qui ne peuvent pas nous laisser indifférents :

  • celle du climat et du réchauffement de la planète à laquelle est liée celle de l’exploitation et de la répartition des richesses et des ressources de la Terre ;
  • et celle de l’accueil ou non de réfugiés et de migrants, avec tous les débats autour de ce qu’on appelait l’« identité nationale » ou que nos politiques nomment la « préférence nationale »…

Sur le premier sujet, la COP21, c’est très bien sauf que ça peut rester des débats de dirigeants et des décisions sans lendemains. Il faut qu’il y ait des implications concrètes dans notre quotidien, qui dépendent de chacun de nous, dans notre façon de consommer par exemple qui a des conséquences sur les modes de vie, les nôtres mais aussi ceux des plus pauvres, ceux qui sont exploités pour que nous ayons tout ce que dont nous croyons avoir besoin.

Et puis sur le deuxième sujet, je me pose vraiment cette question « Que devons-nous faire ? »… Pour le dire autrement et sans faire de politique : qu’est-ce qui sera, dans nos réflexions et nos prises de position, fidèle aux appels de Jésus et de l’Evangile…

La réponse de Jean-Baptiste aux foules qui attendent le Messie est de cet ordre là, de façon un peu décalée. Sa réponse c’est qu’il vient le Messie, qu’il est là, qu’il est celui qui va juger la situation, celui qui fera le tri. Non pas entre ce qui est bon ou mauvais, de notre seul point de vue souvent affectif ou idéologique, mais sur ce qui correspondra ou pas aux appels de l’Evangile…

Du coup, « Que devons-nous faire ? » Nous devons discerner ce qui est ajusté à notre foi, ce qui est fidèle à Jésus et à l’Evangile. Nous devons donc, avant tout engagement, nous mettre à l’écoute de la Parole de Dieu où nous est révélé non seulement qui est ce Dieu auquel nous croyons et que Jésus nous révèle mais aussi qu’est-ce qu’il attend de l’homme, ce à quoi il nous appelle qui aura des conséquences qui concernent notre bonheur parce que ça concerne notre vivre ensemble et parce que ça va induire notre regard sur le monde et sur l’autre quel qu’il soit qui est mon frère en humanité.

« Que devons-nous faire ? » Nous réentendrons que nous devons mettre l’homme et sa dignité au cœur de tous nos choix et de toutes nos préoccupations. Et avoir confiance que le Seigneur est avec nous sur ce chemin, un chemin parfois difficile, qu’il est avec nous et qu’il nous offre même sa force, la force de son Esprit mais aussi celle du sacrement du pardon qui est un beau lieu pour faire avec lui la vérité de notre vie… Prendre soin les uns des autres et de cette terre, c’est à notre mesure, à notre portée, si nous le décidons, et si nous décidons de le vivre avec Dieu. Amen.

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