L'arrière-saison (Philippe Besson)

J'ai été très touché par ce roman. Son histoire, son écriture aussi, cette espèce de délicatesse du style et la façon de mettre en œuvre le récit avec ces courtes phrases, ces extraits de dialogues entrecoupés de souvenirs, d'émotions racontées, et ce qui se joue dans la tête du personnage dont il est question ou dans ce qu'il est en train de mettre en mots...

Nous sommes à Cape Cod, dans la baie de Boston. Dans un bar, chez Phillies. Un dimanche soir...

Louise est là, comme souvent. Et Stephen qui débarque. Après plusieurs années. Cinq ans très exactement. Il l'a laissée pour Rachel avec qui il s'est marié. Douleur terrible qui nous sera partagée, petit à petit...

Elle, elle écrit des pièces de théâtre, depuis. Et là, dans ce bar, elle attendait Norman, qui lui est en train de laisser sa femme Catherine, pour elle. Ils se sont connus par le théâtre, après la séparation d'avec Stephen.

Louise et Stephen... Ils vont finir par se dire. Leur séparation notamment. Mettre en mots ce qui n'était pas envisageable de partager à l'autre. Ils deviennent « capables de partager leurs existences déboussolées, leurs ménages décomposés, leur trentaine ratée. »

Louise sera « médusée par la franchise de Stephen qui ressemble à une catharsis. Elle [va découvrir] ce qu'elle n'aurait pu soupçonner, même dans ses rêves de vengeance. »

Il y a donc Louise et Stephen. Et il y a Ben, le barman ; il a toujours été là, témoin de leurs premières années, de leur séparation, de Louise qui tentait de continuer à vivre, et de ce retour. Il est là, en silence, qui « essaie de comprendre comment deux jeunes gens flamboyants et amoureux, dans l'appétit de leurs vingt ans et un peu plus, sont devenus ces trentenaires peut-être aigris, en tout cas amers, et qui, sans l'avouer, se  consument dans le douloureux regret de ce qu'ils ont été. »

Un très beau roman. Vraiment. Une bien belle mise en mots et en récit du tableau d'Edward Hopper Nightawks (qu'on peut voir à l'Art Institut of Chicago). Original, et surtout bouleversant dans ce que Louise et Stephen osent ici se dire dans cette rencontre à la fois terrible et surprenante, bouleversant dans ce qu'ils ont traversé chacun dans cette histoire et qu'ils finissent par avouer ou révéler à l'autre...

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Philippe Besson, L'arrière-saison, Julliard, mars 2011, 111 pages.

 

 
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