14 Juin 2018
Il s'agit ici d'un récit. Edouard Louis, qui s'est fait connaître pour son roman autobiographique En finir avec Eddy Bellegueule (Seuil 2014) — que je n'ai pas lu —, nous invite à un acte de mémoire qui est aussi une sorte d'acte politique d'écriture contre la violence sociale.
Il raconte dans ces pages son père, la vie familiale. Et par là même il se raconte, il se dévoile, au fil de souvenirs qui lui reviennent alors qu'il visite ce père qui a vieilli, qui est malade, dont il sent combien la vie les a éloigné ou combien elle a révélé l'éloignement inévitable qui devait se creuser entre eux.
C'est l'histoire d'un enfant qui voulait que son père l'aime. Il aime son père, il croit pourvoir le dire. Il pressent que son père, à sa façon, l'aimait, essayait de l'aimer. Mais la vie est dure, la pauvreté vous tue, la violence n'est pas loin. L'incompréhension aussi, entre ce fils qui n'est pas comme son père voudrait... Et la mère, entre les deux, puis seule avec ses enfants.
Un récit poignant qui saisit le lecteur — en tout cas qui a saisi le lecteur que je suis — et qui invite à entrer dans le même acte de mémoire. Car si nos histoires familiales et personnelles peuvent être bien différentes et sont évidemment singulières, la mise en mot de telle dispute familiale ou de telle incompréhension père-fils peut éveiller nos propres souvenirs...
Un beau récit, assez court, bien écrit, bien mené. Encore un livre qu'on ne saurait lâcher facilement, qui vous saisit et vous tient jusqu'au bout. Des pages qu'Edouard Louis dédie au cinéaste Xavier Dolan.
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Edouard Louis, Qui a tué mon père, Seuil, mai 2018, 87 pages, 12€.