31 Décembre 2023
Dimanche 31 décembre 2023 – Sainte Famille (Année B)
Cathédrale Notre-Dame et Basilique Saint-Joseph - Grenoble
Gn 15,1-6 ; 21,1-3 / Ps 104 / He 11,8.11-12.17-19 / Lc 2,22-40
Nous fêtons donc la Sainte Famille et dans la prière d’ouverture nous avons dit au Seigneur : « Tu as voulu, Seigneur Dieu, que la Sainte famille nous soit donnée en exemple ». Quel exemple ? Nous avons alors demandé au Seigneur de nous accorder « de pratiquer, comme elle, les vertus familiales et d’être unis par les liens de [son] amour » c’est-à-dire l’amour de Dieu et même l’Amour qu’est Dieu.
Et juste à préciser cela nous voyons bien en quoi la Sainte Famille est sainte : elle est sainte de la présence même du seul Saint qu’est Dieu, en l’occurrence Dieu fait chair en notre humanité en cet enfant Jésus que nous célébrons ces jours.
Alors à quoi ça nous appelle, nous ? Qu’est-ce que l’Évangile de ce jour et plus largement les lectures de ce dimanche nous disent de cette sainteté à laquelle nous sommes appelés nous aussi et donc du chemin de vie sur lequel avancer avec le Seigneur ?
Ce qui m’a d’abord frappé dans la 1ère lecture – et la 2ème avec – c’est l’appel adressé à Abraham à ne pas craindre, un appel à entrer dans les promesses de Dieu, à savoir celle d’une descendance. Un appel à croire, croire malgré tout, croire malgré les apparences premières et immédiates, croire en ce que Dieu peut faire en nos vies et ce qu’il dit qu’il veut faire. Il s’agit de croire en ses promesses, croire qu’il est le Dieu qui tient promesses.
Et c’est ça que nous célébrons ces jours, Dieu a tenu promesses, il est venu visiter notre humanité et offrir et révéler son salut en ce monde qui en a tant besoin. Et il veut aujourd’hui encore nous faire entrer dans ses promesses de vie et de salut. Tout l’Avent nous a orienté là, notamment avec les lectures du prophète Isaïe que nous avons écoutées et accueillies au fil des semaines.
Dieu tient promesses – « Dieu est fidèle à ses promesses », nous a dit la 2ème lecture. Et saint Joseph comme Marie nous entraînent en cette confiance, cette espérance, il nous y entraînent par leur « oui » respectif, leur « oui » au projet de Dieu par la naissance de Jésus, la venue en notre chair du Verbe de Dieu, sa Parole qui vient se faire l’un de nous.
Et nous l’avons réentendu dans l’évangile de ce jour : Dieu qui advient dans le temps, Dieu qui se fait l’un de nous, c’est Dieu qui vient combler les attentes de son peuple. Et voilà que Syméon comme Anne la prophétesse peuvent chanter le salut qui est là, ce salut qu’ils espéraient et attendaient dans la foi.
« Mes yeux ont vu le salut que tu préparais à la face des peuples : lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à ton peuple Israël » …
Marie et Joseph sont là à recueillir cette louange, et à en être, aussi ; appelés à donner le Christ au monde et appelés à le faire advenir à qui il est et à ce que sera sa mission. Par ces liens de l’amour, justement, dont il était question dans notre prière d’ouverture, en apprenant à Jésus, en sa nature humaine, à vivre de cet amour qu’ils ont pour lui, lui qui est l’amour-même de Dieu pour nous, cet amour qu’il va expérimenter concrètement dans l’humble quotidien d’une vie familiale.
Et c’est bien là, dans ce foyer d’amour, que Jésus va vivre aussi ce qu’on appelle les vertus, et notamment la patience comme la confiance, la force, aussi, qui donne courage, et la tempérance ; c’est là qu’il va vivre la foi, l’espérance et la charité, comme il va sans doute y aider ses parents puisque ces trois vertus sont des vertus théologales et donc un don de Dieu lui-même.
Fêter la Sainte-Famille, c’est déjà la contempler en cela, en cette vie d’amour dans l’humble quotidien des jours. C’est contempler Jésus qui se laisse aimer de son père et de sa mère et qui grandit, qui se fortifie, qui apprend à prier, à rendre service, à écouter et à prendre soin de l’autre.
C’est ce qu’il va nous appeler à vivre et à recevoir de Dieu : nous aimer les uns les autres comme lui nous a aimés. Et aimer Dieu et notre prochain comme nous-mêmes. C’est le cœur de l’Évangile, nous le savons, c’est la récapitulation et l’accomplissement de toute la Loi et donc de toute la Révélation. Aimer. Tout simplement. Aimer comme on apprend à s’aimer dans une famille. S’aimer jusque dans nos balbutiements à aimer bien, et donc pardonner, consoler, se réconcilier.
Tout ça c’est l’Évangile, c’est ce que Jésus nous apprend et qu’il a sans doute reçu de ses parents en son humanité. Dans la patience et la confiance, avec courage aussi dans les épreuves.
Jésus est aimé de ses parents et Jésus expérimente là, en sa nature humaine, ce que veut dire être aimé et donc être aimé du Père. Et ses parents sont témoins pour lui de cette miséricorde de Dieu à laquelle Jésus nous appellera – rappelez-vous, quand il dira à ses disciples (en Lc 6,36) : « Soyez miséricordieux comme le Père est miséricordieux. »
La miséricorde, pour reprendre une définition qu’en donnait le pape François dans son texte d’annonce du « Jubilé de la Miséricorde », la miséricorde c’est « l’amour de Dieu qui console, qui pardonne et qui donne l’espérance ».
Il était justement question de consolation que Syméon attendait pour le peuple et qu’il reconnaît dans ce petit enfant et donc dans ce qu’il est et ce qu’il va devenir pour nous. Il est la consolation de Dieu, son amour sauveur en actes, par toute sa vie et par ce qu’il va nous enseigner et même ce qu’il va nous appeler à vivre : Être et devenir « miséricordieux comme le Père est miséricordieux ».
Figurez-vous que c’est ça la sainteté de Dieu, cette sainteté à laquelle nous sommes appelés. La sainteté de Dieu c’est son amour ; et c’est d’ailleurs ce que St Jean nous dit dans ses lettres, notamment dans la 1ère : « Dieu est amour ».
La sainteté de Dieu, son être même, c’est son amour, son amour sauveur, sa miséricorde, cette miséricorde qui se fait amour du prochain, cet « amour qui console, qui pardonne et qui donne l’espérance », cet amour qui s’approche à hauteur de l’autre et qui consent à prendre soin de lui, à l’écoute de ce qu’il vit et de ce que la vie lui fait traverser.
Et nous le savons bien : toute consolation apaise et relève, tout pardon libère et sauve, toute présence qui se fait proximité, tendresse et compassion redonne de croire en la vie et peut nous sortir, petit à petit, de la désespérance ou du découragement.
Nous retrouvons là ce que le pape François appelle « le style de Dieu : proximité, tendresse et compassion ». Voilà comment aimer, voilà ce que Jésus a expérimenté dans la vie familiale…
Alors que faire, nous aujourd’hui, de tout cela, qu’entendre pour nous ?
Il me semble qu’on pourrait commencer par se demander, en ce temps de Noël : qu’est-ce qui dans nos vies à chacun a besoin de cette consolation de Dieu, cette consolation promise, cette consolation que Syméon reconnaît en Jésus ; qu’est-ce qui a besoin de ce salut en nos vies, et peut-être tout particulièrement dans nos vies familiales ? Qu’est-ce qui a besoin de la lumière du Christ dans ce qui nous est peut-être difficile à vivre, que ce soit dans nos familles ou dans les familles que nous côtoyons et qui nous sont proches ?
Je suis sûr que nous avons des visages ou des situations qui là nous viennent, alors prions pour cela, demandons là au Seigneur sa lumière, sa présence, et demandons-lui que les uns et les autres à qui nous pensons puissent avancer et être renouvelés dans la confiance !
Et puis de ces textes et de cette fête j’entends aussi l’appel à prier pour que nos familles, et plus largement nos lieux de vie communautaire, soient des foyers d’amour où Dieu soit vraiment accueilli et au cœur de notre marche ensemble, des foyers d’amour où nous le laissions prendre toute place et nous apprendre tout-jours et encore à vivre à sa suite et à aimer comme lui. Et que nos familles et nos lieux de vie fraternelle soient du coup, avec lui le Christ, des écoles de la miséricorde, comme nous y appelle sans cesse le pape François – parce que c’est l’appel de l’Évangile ! Notre monde et nos vies ensemble en ont tellement besoin – y compris en Église...
Alors oui, prions, et prenons pour cela quelques instants de silence, maintenant ; prions pour nos familles, et prions les uns pour les autres.
Et n’oublions pas aussi de rendre grâce, comme nous l’avons chanté avec le psalmiste et comme Jésus a dû le vivre en famille : rendons grâce pour tout ce que Dieu nous a déjà donné, et notamment pour l’amour reçu et vécu ! Tout cela c’est force de vie pour avancer, c’est don de Dieu et de son amour qui veut se dire en nos vies et par nos vies. Amen.