Homélie dimanche 31 janvier 2021

4ème dimanche du Temps Ordinaire / Année B

Dt 18,15-20 / Ps 94 (95) / 1Co 7,32-35 / Mc 1,21-28

 

Y’a un truc dont vous m’entendez souvent parler quand je suis d’homélie, je m’arrange toujours pour le glisser l’air de rien ou alors tel une page de pub, c’est les Frat’ – les Frat’ étudiantes ou Jeunes pros – qui sont des Frat’ autour de la Parole de Dieu – un temps, un « lieu », quelques personnes avec qui je vais écouter ce que Dieu peut vouloir me dire par l’Évangile du dimanche. Et c’est tout simple : d’abord (1) on se partage chacun un truc que j’apprends ou que je découvre dans le texte, ou qui me question, puis (2) ce que ça me dit à moi, à quoi ça m’appelle, et enfin (3) une intention de prière que ça fait naître en moi

Si je commence ces quelques mots d’homélie en parlant des Frat’ c’est parce que mercredi j’étais dans une coloc que j’accompagne et qu’on a pris ce temps autour de cette page d’évangile qu’on vient d’entendre. Et l’intention de prière qui m’est venue c’était de demander au Seigneur qu’il me donne la grâce de la stupeur ; je le demande pour moi mais plus largement c’est ma prière pour chacun de nous, que nous puissions, à l’écoute de ce que le Seigneur veut nous dire par sa Parole, que nous puissions être dans la stupeur et la stupéfaction.

Pourquoi je dis ça ? Parce qu’il me semble que souvent on écoute tout ça bien gentiment, messe après messe, un peu comme des belles histoires auxquelles on veut bien croire, mais que ça risque souvent de nous glisser dessus un peu comme l’eau sur le plumage d’un canard.

Et ce qu’on vient d’entendre par exemple. Ok Jésus est plus fort que les forces démoniaques de l’homme possédé. Tant mieux pour cet homme. Sauf que dans nos vies ça paraît moins évident, moins miraculeux, du coup y’a un risque à laisser glisser…

Ce qu’on vient d’entendre, rappelons-nous tout d’abord que dans l’évangile de Marc c’est le 1er miracle de Jésus. On comprend du coup la stupéfaction, ça leur en met plein la vue. Et on aimerait bien, nous aussi, que Dieu parfois nous en mette plein la vue ; alors on saurait que c’est vrai cette histoire-là et on se dit sans doute que du coup ce serait plus facile de croire… Sauf que visiblement ça ne marche pas comme ça, du moins pas directement…

C’est donc le 1er miracle de Jésus et on nous dit que ce qui frappe les gens, en fait, c’est qu’il parle avec autorité. Dans notre temps de Frat’ de mercredi, plusieurs se sont arrêté là-dessus, en se demandant ce que ça veut dire. Et de fait à première vue on ne sait pas trop, on ne sait pas ce que Jésus a dit dans la synagogue. Mais visiblement y’a un truc, y’a comme une vérité de ce qu’il dit et de ce qu’il est, ça s’impose. Y’a un truc ajusté en lui et avec ce qu’il dit et ce qu’il fait.

Et justement, c’est de ça dont il s’agit dans la suite du récit de ce matin : ce que Jésus dit, ça arrive, ça s’accomplit. Or dans la Bible c’est le propre de Dieu, rappelez-vous par exemple le 1er récit de la Création, dans la Genèse. Dieu dit et ça advient. Sa parole fait ce qu’elle dit. Contrairement aux scribes et aux pharisiens à propos desquels Jésus dira un jour : ils disent mais ne font pas.

Quand Jésus dit à l’esprit qui tient captif cet homme tourmenté, quand il lui dit de se taire en lui et de sortir, ça advient. Et les gens sont pris de stupeur car seul Dieu peut faire cela, seul Dieu peut avoir prise sur les forces du mal.

Nous ça nous paraît évident car on connaît la fin de l’histoire, on sait que Jésus est le Fils de Dieu et que sa mort et sa résurrection ça vient dire cette victoire de Dieu sur toute forme de mal et sur la mort comme fin de toute vie. On connaît ça, on le sait, donc ça nous paraît évident, au moins dans le discours. Mais s’il vous plait, non, laissons-nous surprendre, laissons-nous interpeller par cela, que ça nous tourne vers le Seigneur quand nous sommes aux prises avec le mal, pour crier vers lui notre désir qu’il fasse taire les forces du mal en nous !

Parce qu’il est là le salut que Jésus vient révéler. On retrouvera d’ailleurs ce même processus de Jésus qui fait taire les forces du mal trois chapitres plus loin, avec la tempête apaisée – c’était l’évangile d’hier à la messe.

Demandons au Seigneur la grâce de la stupéfaction, demandons-lui de nous laisser surprendre par sa Parole et son action en nos vies. Et du coup qu’il nous donne de voir comment il est présent et comment il agit.

Demandons-lui cela en acceptant que Dieu est et sera toujours au-delà de ce que nous avons compris de lui, qu’il sera toujours au-delà de toute connaissance que nous pouvons avoir de lui, au-delà de tout savoir que nous pourrions acquérir.

D’ailleurs l’enjeu de notre vie ça n’est pas de savoir des choses sur lui, c’est de croire en lui, croire qu’il est là, croire qu’il est quelqu’un qui est là et pas juste une hypothèse bien sympa, croire qu’il peut quelque chose pour nous et que quelque chose nous sera donné car Jésus par sa venue nous révèle que Dieu tient promesse. Il est ce prophète annoncé dans la 1ère lecture que Dieu envoie, qui se tient tau milieu de nous. Et après sa résurrection, il nous l’a promis, à nous aussi aujourd’hui : « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps » (Mt 28,20). Ayons foi, ayons confiance en cela, laissons-nous surprendre par cette Parole, alors nous apprendrons à voir, au fil des jour et des années, comment il est présent, comment il nous rejoint, comment il nous sauve de nos emprisonnements, de nos tempêtes, de ce qui nous lie intérieurement, et de toute nos épreuves quelles qu’elles soient.

Et pour ceux qui savent ce que je traverse depuis plusieurs années avec la maladie, vous savez que ça n’est pas que des mots pour une espèce de consolation facile, non, c’est parfois de l’ordre du combat. Ce qui nous est proposé c’est un chemin de révélation, un chemin sur lequel nous avancerons petit à petit si nous acceptons de nous laisser surprendre par Dieu, nous laisser surprendre par qui il est, nous laisser surprendre par sa Parole de Vie qui aujourd’hui encore nous permet de découvrir la puissance de Dieu et ses appels très concrets... A condition de bien vouloir écouter vraiment. Et de nous y aider les uns les autres, notamment pour quand ce sera plus difficile.

Et à condition de ne pas être dans le savoir comme l’esprit impur qui habite l’homme tourmenté. Nous ne savons rien, ou pas grand-chose. Et nous ne sommes pas invités à savoir des choses sur Dieu mais à croire en lui. Et à entendre que non il ne vient pas pour nous perdre, c’est le propre du mal de venir mettre le doute en nous et sur la présence de Dieu à nos côtés. Oui, Jésus est le saint de Dieu, Dieu lui-même dont la sainteté c’est l’amour sauveur qu’il est et qu’il veut nous offrir. Donc Jésus, oui, est bien le Saint de Dieu, puissions-nous le croire, il est celui qui vient non pas pour nous perdre, c’est-à-dire nous détourner du réel de la vie, non, il vient pour nous sauver, nous libérer de ce qui en nous nous possède et nous empêche de vivre.

Quelles formes ça prendra, et quand ça adviendra, j’ai envie de dire que ça n’est pas la question. Puissions-nous juste le croire, puissions-nous restez en mode « stupeur », ne jamais nous contenter de vérité toutes faites de ce que nous saurions sur Dieu ou ce que nous ne comprendrions pas, non, mais demander la grâce de nous laisser surprendre par sa Parole et sa Présence dans nos vies.

C’est vraiment ce que je nous souhaite pour notre chemin de chaque jour, jour après jour, dans le réel de ce que nous avons à traverser, y compris jusque dans nos épreuves. Et que là – dans ce réel-là – nous puissions croire vraiment, et nous y aider, que Jésus est présent, qu’il se tient au milieu de nous comme il l’a promis, et qu’avec lui nous allons faire l’expérience d’un salut, d’une libération, faire l’expérience que la vie est plus forte que le mal, et que le mal, avec Dieu, n’a pas prise sur nous, qu’il n’a pas le dernier mot, non…

Figurez-vous que c’est cela que nous célébrons à chaque eucharistie – vous le savez mais l’enjeu c’est d’y croire vraiment. Et c’est cela que Dieu veut nous révéler très concrètement par sa Parole…

Je m’arrête là-dessus. Prenons quelques instants de silence pour laisser tout cela prendre place en nous, et pour recueillir ce que ça vient bouleverser ou réveiller en nous. Et tout simplement nous le déposons auprès du Seigneur pour que là il vienne nous rejoindre dans cette eucharistie, que là il vienne se révéler à nous aujourd’hui. Amen.

Partager cet article
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :