Sacerdoce (le film)

Sacerdoce (le film)

Ce film sort en salles ce jour. Et, pour l’avoir vu déjà, je recommande. C’est un film documentaire sur des figures des prêtres, une façon de pénétrer un peu dans ce qui fait notre vie et notre ministère.

Cinématographiquement j’ai trouvé très réussi. Un beau documentaire. Et ces hommes rencontrés sont touchants de foi, de désir de se donner, de sincérité aussi, notamment à propos de la question du célibat et de leur affectivité mais aussi de ce qu’ils partagent de leurs joies ou de leurs questions et de leur histoire vocationnelle…

Après, pour de vrai, je ne m’y retrouve pas forcément – ou pas complètement. Ce sont des profils un peu atypiques. On en suis trois surtout, trois qui ont des ministères très particuliers : l’un dans sa caravane, qui sillonne l’Ariège en solitaire et qui est passionné de skate, un autre en ministère auprès de jeunes garçons ados, qui leur partage sa passion de la montagne et les invite au dépassement de soi, et le troisième qui est missionnaire aux Philippines et qui s’occupe des enfants des rues.

À ces deux figures s’ajoutent deux autres, qui ont un ministère plus ordinaire, un ministère paroissial, mais ce n’est pas tant que ça ce qui est montré d’eux : un plus âgé, parisien, dont les propos ponctuent le film, très beaux et profonds, telle les paroles de sagesse d’un aîné, des convictions sur l’être-prêtre – et pas sur le faire –, et puis ce jeune prêtre qu’on voit un peu en paroisse mais qu’on voit aussi beaucoup sur son vélo, qui a trouvé là son équilibre de vie et un lieu de dépassement de soi – c’est ce même (je crois, car il a parfois la barbe et parfois non, et de même pour la soutane ou le col romain) qu’on voit accueillir une victime d’un prêtre pédophilie, dans une rencontre pleine d’émotion et assez touchante.

Le gros bémol que je mets à tout ça c’est que, pour les trois qu’on suit de plus près dans leur ministère assez particuliers, ce sont des personnalités plutôt « isolées » dans l’exercice de ce ministère, comme prêtres, dans ce qu’on nous en montre en tout cas ;  ça donne l’impression que c’est « leur » mission à eux... Jamais – à une exception près – on ne les voit avec des confrères, porter la mission ensemble ou partager un moment de vie fraternelle, en presbytérium, ni même avec des laïcs d’ailleurs – sauf pour celui qui s’occupe des enfants des rues – ; on ne les voit pas non plus avec leur communauté, ou quasi pas – il y a des rencontres, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit, tout est rencontres, même ; mais dans ce qui est surtout montré ici c’est très lié à leurs ministères bien particuliers, pour les trois dont j’ai déjà parlé, ou à leurs lieux de détente, pour deux d’entre eux, plus que de les voir avec des communautés en tant que telles de type communautés paroissiales.

J’aurais aimé d’ailleurs qu’on entre un peu plus dans le quotidien d’un prêtre ordinaire, un prêtre de paroisse comme la plupart le sont, qu’on puisse les voir prier plus que ce qui en est montré, qu’on puisse les voir célébrer les sacrements et rejoindre des familles qui bien souvent reviennent vers l’Église à cette occasion là, qu’on puisse notamment les voir s’arrêter pour célébrer la messe – ouf, ça vient en finale du film, et en tout cas c’est central dans notre vie – ou faire halte dans le silence de la prière ou la lecture de la Parole de Dieu, et qu’on puisse les suivre enfin dans telle ou telle rencontre paroissiale ou dans une famille – pour de vrai tout ça on l’a un peu, mais un peu seulement…

On est par contre vraiment témoins du don d’eux-mêmes, on sent la foi qui les habite. Des hommes donnés, avec leur humanité, leurs aspirations, leur besoin de se détendre aussi ou de ne pas être que dans la représentation ou les choses à faire du ministère. Et c’est beau. Là je me retrouve.

Ce film est quand même une très belle façon d’entrer un peu dans l’intime et surtout le sens de notre vie de prêtres, à une époque où dans nos communautés on peut sentir parfois un fossé se creuser entre les prêtres et celles et ceux à qui nous sommes envoyés, un fossé qui se creuse de compréhension de qui nous sommes et de ce pour-quoi nous avons donné notre vie – pour le Christ et pour ces communautés, pour vous ! – ; un fossé qui se creuse parce qu’on n’a finalement peu d’occasions de se rencontrer un peu gratuitement, et parce que la crise des abus et un forme de cléricalisme de certains (prêtres comme laïcs) instaurent une climat de défiance ; peut-être aussi parce qu’on n’ose peu se dévoiler et donc se donner mutuellement les moyens de se connaître et de se comprendre mieux… 

Je recommande donc ce film, avec les bémols ci-dessus mentionnés – je pense même que je le reverrai. Une façon de toucher du doigt un peu de qui nous sommes et de ce qui nous habite.

Merci au réalisateur, Damien Boyer, et son œil extérieur qui a voulu comprendre qui sont ces hommes qui sont prêtres et qui choisissent pour cela le célibat. Et merci à ces confrères qui ont accepté l’aventure de se laisser filmer et de nous faire entrer dans une part de leur intimité et dans ce qu’ils sont et ce qu’ils vivent. Merci.

Pour en savoir plus sur le réalisateur et sur son projet vous pouvez aller lire cet article (où l’on se rend d’ailleurs compte que le choix et le profil des prêtres suivis a un peu changé en cours de route).

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