16 Novembre 2024
Samedi 16 novembre 2024
1Jn 4,7-12 / Ps 102 (103) / Mt 18,15-20
J’espère que ça vous surprend ce qu’on vient d’entendre, parce que ça n’est pas très commun comme texte d’Évangile, en tout cas pour une messe de mariage ! Et pour cause, en apparence première ou immédiate ça ne parle ni d’amour ni d’engagement, ni de mariage. Contrairement à la 1ère lecture où là, pour le coup, le lien paraît quand même un peu plus évident. Je vais d’ailleurs commencer par là…
L’appel qui nous est adressé dans cette 1ère lecture, il est assez clair je crois ; pour vous, Pierre et Bénédicte, comme pour chacun de nous aussi : nous aimer les uns les autres. C’est le commandement que Jésus nous a laissé. C’est ce qu’il nous appelle à vivre. On pourrait même dire que c’est ça être chrétien, c’est ça d’abord.
Et c’est sans doute pour cela déjà que le mariage est un sacrement : nous aimer – vous aimer, Pierre et Bénédicte –, rien d’autre ou rien de mieux ne dit Dieu et son projet de salut pour nous tous.
L’amour est sauveur. L’amour c’est une force de vie incroyable qui peut nous redonner confiance en nous, en Dieu et en la vie. L’amour c’est ce qui va nous donner d’oser nous bouger et dépasser nos limites ou nos petits conforts faciles. Et l’amour le sera d’autant plus qu’il aura su aussi nous donner de vaincre les peurs ou les résistances voire ce mal qui peut défigurer toute vie comme celui que parfois nous nous faisons l’un l’autre...
On le sait bien d’ailleurs, il ne peut y avoir d’amour vrai, d’amour qui dure, d’amour qui ne fait pas semblant, sans ces pardons qu’il faut apprendre à se donner et qu’il faudra vouloir oser et offrir à l’autre…
Et là, vous voyez comment on peut commencer à faire le lien avec notre page d’Évangile… Mais je reste encore un peu sur cette 1ère lecture…
Il y a donc ce commandement de l’amour, dont vous êtes appelés à devenir témoins, Pierre et Bénédicte, témoins que se donner et se livrer entre les mains d’un autre c’est chemin de bonheur – ça peut l’être –, mais plus encore c’est le chemin de sainteté que vous décidez d’emprunter.
Alors c’est vrai, je ne suis pas sûr que ce mot de « sainteté » ça parle à tout le monde, ça peut nous paraître un peu abstrait ou un idéal un peu trop lointain pour nous, la marche peut nous paraître un peu haute. En plus la question du Ciel c’est sympa mais essayons déjà de vivre notre vie ici-bas et le quotidien des jours avec son lot de joies et de difficultés ! Mais justement !
La sainteté, l’appel à la sainteté, c’est croire que Dieu nous veut avec lui, comme lui, et même en lui. Et que c’est l’horizon auquel nous sommes promis, si nous le voulons bien, mais c’est aussi ce qu’il nous promet dès ici-bas, pour notre marche de chaque jour. En aimant, justement ; en nous donner les moyens de nous aimer et de faire grandir et fructifier cet amour.
Et là où l’amour est vécu, Dieu est présent, Dieu se murmure en notre vie. Et quand Dieu est là, que je le reconnaisse ou pas, que j’ai conscience de sa présence ou pas, alors un salut est possible. Et le salut c’est être libéré de tout ce qui m’empêche de vivre pleinement, c’est d’être libérer de nos paralysies de tous ordres, nos peurs comme ce mal qui nous tombe parfois dessus et qui semble nous clouer au sol.
Notre foi – la foi chrétienne – et donc l’acte de foi auquel nous sommes invités, la confiance que nous pouvons avoir, c’est que quoi qu’il nous arrive, avec Dieu, et donc si nous aimons, alors la vie est et sera plus forte que tout mal et que tout chemin de mort.
C’est un acte de foi à poser. Et il peut changer notre regard sur ce que nous aurons à vivre et à traverser, et même sur l’autre. Mais c’est un acte de foi à poser. Parce que les apparences premières et immédiates vont parfois nous faire douter de cela – on le sait bien, tous autant que nous sommes. Et on le sait bien c’est parfois un combat de s’aimer, s’aimer vraiment, de vouloir continuer à aimer l’autre, et même d’y croire et du coup de s’en donner les moyens.
Mais à cela que vous vous engagez aujourd’hui, Pierre et Bénédicte. Vous avez décidé de faire ce pari de confiance et de demander à Dieu d’en être avec vous, d’être présent avec vous sur ce chemin, et que son amour pour vous soit force de vie pour votre amour à vous. Que ça le rende plus fort, que ça vous aide au fil des jours, et que ça vous permette de vous soutenir l’un l’autre sur ce chemin.
Mais c’est un acte de foi à poser. Et une décision, un engagement à se redire jour après jour. Quand la vie sera facile, pas de souci, sauf à ne pas subir les choses sans se poser de questions, comme si c’était normal et évident. Non. C’est quand ça va bien qu’il faut s’entraîner pour quand ce sera plus difficile. Et c’est là qu’il va falloir s’entraîner à se dire les choses mais aussi à compter sur Dieu et donc à lui dire les choses. Il y a un acte de foi à poser qu’il est là avec vous, qu’il s’engage avec vous sur le chemin. Mais on le sait bien, ça n’est pas magique, et un mariage chrétien ça ne tient pas plus facilement qu’un autre – ça se saurait. Excusez l’expression mais ça ne pas tomber du Ciel ! Non… il faut se donner les moyens. Se dire les choses et mettre Dieu au cœur de notre vie – au cœur de votre vie, Pierre et Bénédicte.
Partagez-lui vos joies comme vos peines. Déposez en lui vos questions comme vos colères. Chacun et ensemble. Et demandez-lui qu’il vous éclaire par son Esprit Saint. Et notamment quand vous aurez des décisions à prendre. Associez-le, bien simplement.
Et n’oubliez pas ce qu’on a entendu en finale de notre page d’Évangile : « Là où deux ou trois sont réunis en [son] nom il est là au milieu d’eux » ; il est là. Il y a un acte de foi à poser. Et il y a là à s’en donner les moyens. Lui dire les choses. Et vous dire les choses, mutuellement.
Ce qui va bien déjà, ce qui vous réjouit. Rendez grâce ensemble de ce qu’il y de bon et de beau au fil des jours. Même dans les toutes petites choses du quotidien. Et même déjà là d’ailleurs !
Et apprenez aussi à vous demander pardon quand vous aurez des paroles ou des gestes blessants. Quitte à vous faire aider si vous avez du mal à entendre ce qui a pu se jouer entre vous. C’est justement notre page d’Évangile – je le redis avec mes mots à moi : « Si ton frère – ou ta sœur, ton mari, ta femme –, s’il a commis quelque chose contre toi, s’il y a un truc qui ne va pas entre vous, alors va le voir, seul à seul d’abord. S’il t’écoute, c’est gagné, pour vous deux. S’il ne t’écoute pas, s’il ne comprend pas, alors va prendre quelqu’un qui sera pour vous témoin, quelqu’un en qui vous avez confiance qui va pouvoir entendre avec vous et vous aider à comprendre ce qui, là, se joue pour vous », etc.
Il est beau ce chemin sur lequel vous avez décidé de vous engager, Pierre et Bénédicte. Mais c’est un chemin, avec ses escarpements aussi et ses risques de chute quand ça deviendra vertigineux et que certains choix ou certains événements seront un peu acrobatiques. L’enjeu c’est d’avancer, c’est de mettre un pied devant l’autre, c’est de s’y aider, se soutenir, s’entraider – se donner la main. Et vous verrez, l’horizon qui va s’ouvrir ça vaut vraiment le coup. Mais un jour après l’autre, et pas à pas. Et avec le Seigneur. Vraiment.
Il est là avec vous, il s’engage avec vous. Par son Esprit Saint que nous allons invoquer sur vous et sur votre chemin de vie et par les uns et les autres que nous sommes et qu’il met sur votre route. Laissez-vous aider quand il faudra, laissez-vous aimer. Et que votre amour rayonne autour de vous. Alors vous serez témoins de Dieu puisque l’amour vient de Dieu, nous a dit St Jean ; et que Dieu est amour, que Dieu, même, c’est comme l’amour : on voudrait des preuves, on voudrait que ça en mette plein la vue, mais non, c’est une histoire de confiance, comme cette confiance en l’autre qui est là à nos côtés, confiance en son amour qui ne se prouve pas mais qui s’éprouve et surtout qui se pressent.
Alors je ne sais qui est Dieu pour un certain nombre d’entre vous, mais je crois qu’il est là avec nous et qu’à chacun il voudrait dire combien il veut pour nous le salut : que nous ayons confiance qu’avec lui la vie est plus forte que tout, que malgré les apparences premières et immédiates la vie est et sera plus forte que toutes ces forces du mal qui parfois nous assaillent et nous traversent…
Je ne sais qui est Dieu pour un certain nombre d’entre vous, je ne sais non plus comment nous y croyons encore ou pas en l’amour pour toute la vie, l’amour qui peut être une vraie force de vie et un chemin de bonheur quoi qu’il nous arrive, mais c’est bien ce que nous voulons demander à Dieu pour vous, Pierre et Bénédicte. Et c’est même ce que nous pouvons demander pour nous-mêmes.
Je vous propose qu’on prenne quelques instants de silence, là maintenant, pour laisser remonter en nous ce que ces mots viennent peut-être éveiller, ce que ça fait remonter en nous. Et faisons ce pari de confiance que si Dieu existe – ce que je crois – et que s’il veut notre bonheur –je le crois aussi –, alors nous pouvons lui confier ce qui nous habite, là maintenant. Qu’il l’entend et qu’il le prend avec nous, qu’il peut le porter avec nous. C’est notre prière.
C’est en tout cas la mienne pour vous tous et pour vous, Pierre et Bénédicte. Amen.