2 Mars 2025
8ème dimanche du Temps Ordinaire - Année C
Si 27,4-7 / Ps 91 / 1Co 15,54-58 / Lc 6,39-45
En méditant ces textes ce matin, je me disais qu’ils tombent bien, à quelques jours du carême ! Et même que ça sonne un peu comme des trompettes qui annoncent un évènement important qui vient ! Y’a quelque chose à entendre !
Mercredi nous entrons en carême, ce temps qui nous est donné pour nous préparer aux fêtes pascales, ce temps aussi de l’entraînement au combat spirituel, ce combat spirituel qui est celui de nos vies à tous et de toute une vie. Et ces textes, aujourd’hui, c’est un peu comme si on nous invitait à nous poser 2-3 secondes, 2-3 minutes, pour regarder où on est et s’y mettre vraiment dès mercredi, se mettre dès mercredi à ce temps d’entraînement qui va commencer.
Alors je ne sais pas si vous êtes prêts à ça, mais dès ce soir faut qu’on se pose 2-3 questions !
Et j’ai envie de commencer tout cela avec ce verset qu’on a entendu dans la 1ère lecture, quand Ben Sira le sage nous dit : « C’est le fruit qui manifeste la qualité de l’arbre » … De fait, ça paraît un peu une évidence, non ? Ceci dit si on transpose sur nous – c’est nous l’arbre, et c’est même chacun de nous, c’est vous comme moi –, du coup c’est quand même intéressant de se demander quel fruit nos vies produisent, et quand je dis nos vies je parle évidemment de notre vie chrétienne, je parle de notre être-baptismal : quel disciple et quel témoin d’Évangile sommes-nous ?
Et c’est une question que je me pose souvent, pour moi déjà, mais pour nous tous qui venons dimanche après dimanche écouter la Parole de Dieu et célébrer le Christ Jésus qui vient se donner à nous pour que nous devenions ses témoins dans le concret des jours et de ce monde : qu’est-ce que nous donnons à voir de l’Évangile ? Qu’est-ce que nous donnons à voir du Christ Jésus qui veut offrir son salut à tous et qui nous y appelle ? Qu’est-ce que nous donnons à voir de l’espérance chrétienne dans un monde qui est tellement marqué par le mal et la violence ?
Pour le dire autrement : quel fruit sommes-nous ? Ou plutôt : c’est quoi la fécondité de notre vie avec le Christ, et de quoi avons-nous besoin pour que nos vies soient fécondes, fécondes de sa présence à lui et de l’amour sauveur du Père qu’il veut offrir et révéler au monde ?
Comment on va nourrir notre vie chrétienne, pour être un arbre qui donne du fruit et pas cet arbre pourri de l’évangile qu’on vient d’entendre !? Parce que c’est ça l’enjeu ! Et pour une part c’est bien ça aussi l’enjeu de ce carême qui vient et qui va commencer mercredi !
« C’est le fruit qui manifeste la qualité de l’arbre », disait Ben Sira le sage… Et moi ça m’a fait penser à Jn 15, la Vigne, une page d’évangile qu’on entendra après Pâques, où Jésus nous dira – je le dis avec mes mots à moi – : Demeurez dans mon amour, gardez mes commandements – gardez ma Parole – et vous porterez beaucoup de fruit – c’est-à-dire : ça va porter son fruit, beaucoup de fruit, et le seul fruit véritable, celui de Dieu lui-même : son salut. Et là-dedans, notre part à nous, c’est de demeurer en lui, demeurer en son amour, à l’écoute de sa Parole et en vivant ses commandements... Ça va, c’est clair, non ?
Alors on va s’y mettre, pendant ce temps du carême, on va se donner les moyens de prier, et pour ce faire de creuser de la place en nous, de nous débarrasser de ce superflu du quotidien qui prend parfois beaucoup de place et pas mal de temps aussi, tout ce qui nous empêche de faire mieux place à Dieu et aussi au prochain qui est là. Et puis quels moyens on va se donner chacun pour écouter la Parole de Dieu, dans la prière par exemple, mais pourquoi pas aussi en se motivant à 4-5 pour lire ensemble l’évangile du jour ou l’évangile du dimanche et pour faire ensemble l’expérience que ça parle, que Dieu me parle aujourd’hui.
C’est tout simple comme expérience :
Vous voyez ça n’est pas très compliqué, et en plus ça marche aussi pour la prière personnelle : 1/ qu’est-ce que ça raconte ce texte, 2/ qu’est-ce que ça vient me dire à moi, là où j’en suis et au cœur de mes questionnements du moment, et 3/ quelle prière jaillit de tout cela.
L’enjeu de se donner les moyens d’écouter la Parole de Dieu comme une Parole, justement, c’est ce dont parlait le début de notre page d’évangile de ce soir avec cette histoire d’aveugles : nous mettre à l’école de Jésus, faire de lui notre maître, et donc regarder comment il s’y prend, écouter ce qu’il veut enseigner à ses disciples et donc les appels qu’il nous adresse, et marcher humblement avec lui. C’est entrer dans son regard à lui sur nous et sur le monde, c’est sortir de nos aveuglements ou nos points de vue étroits. Et pouvoir guider d’autres, être témoins pour d’autres.
Alors c’est vrai, ça va nous mettre devant nos manquements à l’appel, et notamment à l’appel à aimer, à aimer pour de vrai, à aimer même nos ennemis – vous vous rappelez, c’tait l’évangile de la semaine dernière. Ça va nous mettre face à notre péché. Même si on voit mieux celui des autres que le nôtre, sans doute que ça nous rassure, ça nous dédouane. Mais c’est un fait : nous manquons aux appels de Dieu et nous sommes pécheurs. La poutre dans notre œil. Et là aussi y’a du boulot, on le sait bien si on veut bien regarder en vérité notre petite vie à chacun.
Eh bien vous avez de la chance, parce que le carême c’est aussi fait pour ça, pour prendre le temps de faire retour vers le Seigneur, humblement, en vérité, malgré tout, pour lui demander sa force d’amour, la force de son pardon, pour lui demander de marcher mieux à sa suite et de vivre les réconciliations qu’il y a à vivre et qui sont de l’ordre du salut et même d’une résurrection. Nous réconcilier avec les autres, nous réconcilier avec Dieu, nous réconcilier avec nous-mêmes. Et on va entendre ça très fort mercredi dans la 2ème lecture, quand St Paul nous dira : « Nous vous en supplions, au nom du Christ, laissez-vous réconcilier avec Dieu » ; et St Paul dira même que nous sommes appelés à devenir ambassadeurs du Christ, ambassadeurs de cette réconciliation.
Alors oui, pour de vrai, notre arbre est parfois un peu pourri… et du coup quel fruit ça peut donner, c’est quand même la question… Quel témoignage on donne, c’est bien le problème… Alors je repose ma question du départ : qu’est-ce que nous donnons à voir du Christ et de on Évangile, qu’est-ce que nous donnons à voir de ses appels, son appel à aimer, son appel à être miséricordieux comme le Père est miséricordieux, son appel à vivre le pardon et la réconciliation, son appel à nous faire proche de celui qui souffre ou qui peine, quel qu’il soit et quel que soit le mal qu’il ait pu faire ?
Au nom du Christ, je vous en supplie, vivez à fond ce carême qui vient ! Donnez-vous les moyens de la prière et de l’écoute de la Parole de Dieu. Saisissez les propositions qui vous seront faites par la paroisse ! Profitez-en, quoi ! C’est le moment d’avancer, de progresser et de grandir en promesse de salut et de résurrection. Parce que c’est bien ça le but de cette marche qui va commencer, c’est Pâques, c’est cette victoire du Christ dont parlait notre 2ème lecture de ce jour.
Entendons d’ailleurs ce que St Paul nous a dit là – et je terminerai par cela – : « Rendons grâce à Dieu qui nous a donné la victoire par notre Seigneur Jésus Christ. Ainsi, mes frères bien-aimés, soyez fermes, soyez irréprochables, prenez une part toujours plus active à l’œuvre du Seigneur, car vous savez que, dans le Seigneur, la peine que vous vous donnez n’est pas perdue ».
Vous entendez ce que St Paul vient de dire : la peine que vous allez vous donner pour ce carême qui vient, cette peine n’est pas perdue. La victoire nous est promise, celle de la vie, celle de l’amour de Dieu pour nous. Alors rendons grâce, oui, rendons grâce déjà, dès cette eucharistie, et demandons au Seigneur qu’il nous donne la force, le courage et même le désir, de nous y mettre, d’être fermes et résolus pour accueillir le don de Dieu, pour accueillir sa miséricorde et en vivre, cette miséricorde qui est – je le rappelais la semaine dernière avec cette définition que donnait le pape François il y a quelques années déjà, pour le Jubilé de la miséricorde, justement –, cette miséricorde de Dieu qui est son amour « qui console, qui pardonne et qui donne l’espérance ».
Voilà ce qui nous est promis, voilà ce que nous avons à vivre. Voilà le programme pour ce carême qui vient et pour lequel nous demandons au Seigneur sa force et sa grâce de salut, et sa présence avec nous. Amen.