Homélie épiphanie 2015

Samedi soir 3 janvier 2015

Eglise ND (BJ) – Messe des jeunes

Is 60,1-6 / Ps 71 (72) / Ep 3,2-3a.5-6 / Mt 2,1-12

Je me demande toujours comment est-ce que nous entendons et écoutons ces textes archi-connus ? … Je ne sais pas si vous connaissez ce jeu télévisé d’il y a quelques années (et qui continue à passer, on m'a dit avant la messe ; c'était hier soir) « Qui veut gagner des millions »… On aurait pu y trouver cette question : « Dans ce récit qu’on vient d’entendre, combien y a-t-il de rois? »…

  • Réponse A : 3 [les fameux rois-mages qu’on a mis ou qu'on va mettre dans nos crèches, Melchior, Gaspard et Balthazar – par contre ne me demandez pas d’où sortent ces prénoms, ce n’est pas dans l’évangile]…
  • Réponse B : 1 seul [le roi Hérode]...
  • Réponse C : 4 [les mages et Hérode]…
  • Réponse D : 2… [la bonne réponse !]

2 rois qui sont donc, par ordre d’apparition dans le texte : Hérode, roi d’Israël, et Jésus, que les mages appellent « roi des Juifs ». Parmi nous, s’il y en a qui commencent à connaître un peu la Bible soit à force de la lire soit à force de l’entendre à la messe, la mention « roi des Juifs » vous fait peut-être penser à un autre épisode de la vie de Jésus, à savoir : le procès de Jésus, avec Pilate qui lui demandera : « Es-tu le roi des Juifs ? », et Jésus répondra : « C’est toi qui le dit » ; et à la crucifixion, Pilate fera placer sur la croix un écriteau avec la mention : « Jésus le Nazaréen, roi des Juifs ».

Dans notre évangile, nous avons donc 2 rois. Ni 3, ni 5 : il n’est pas dit dans notre texte que les visiteurs venus d’Orient, les mages, sont des rois. C’est le prophète Isaïe, dans la 1ère lecture, qui annonçait que des rois allaient reconnaître la lumière qui s’est levée pour Jérusalem. A propos de nos mages encore, si vous y regardez de plus près encore, il n’est pas dit non plus qu’ils soient 3 ; on parle des « mages », sans plus de précision. Par contre il y a 3 sortes de cadeaux (dont 2 qui étaient déjà mentionnés dans la 1ère lecture) : l’or et l’encens dont parlait déjà Isaïe et la myrrhe ; trois cadeaux qui sont symboliques, pour nous dire qui est ce petit enfant, ce « roi des Juifs » devant lequel les mages se prosternent : l’or nous dit qu’il est bien « roi » ; l’encens rappelle la liturgie du Temple et plus largement des religions à mystères, et donc l’encens nous dit de Jésus qu’il est « prêtre », c’est-à-dire « médiateur » entre Dieu et les hommes ; la myrrhe, elle, c’est un peu plus subtil (c'est le cadeau qui n'était pas dans Isaïe), elle nous renvoie à une autre réalité, elle est comme un objet « prophétique » qui nous dit déjà quelque chose de l’identité de Jésus : la myrrhe c’est un parfum pour embaumer les morts, c’est du coup comme une annonce, dès le début de l’évangile, de la mort et de la résurrection de Jésus.

Par rapport à ce qu’on a entendu le soir de Noël, nous sommes dans le dévoilement d’une autre réalité du même mystère. Ce n’est pas la suite de l’histoire par rapport à la nuit de Noël, parce qu’on a changé d’auteur et que chez Matthieu il n’est question ni de la crèche, ni des anges, ni des bergers, mais seulement de ces mages venus de l’Orient. C’est le même mystère mais sous un autre angle. Et pour la 1ère lecture c’est pareil ; c’était presque la même qu’au soir de Noël, mais avec un petit « plus ». L’autre jour Isaïe nous disait : « Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière, sur le pays de l’ombre une lumière a resplendi » ; et aujourd’hui on a entendu du même Isaïe : « Debout, Jérusalem, resplendis : elle est venue ta lumière, et la gloire du Seigneur s’est levée sur toi. Regarde, l’obscurité recouvre la terre, les ténèbres couvrent les peuples mais sur toi se lève le Seigneur, et sa gloire brille sur toi. Les nations marcheront vers ta lumière, et les rois vers ta clarté naissante »

Celui qui vient de naître, celui que nous fêtons était bien le Messie attendu par le peuple, mais plus encore il vient pour toutes les nations. Le salut n’est pas que pour les « bons » croyants – vous mettez des guillemets à « bons » –, mais pour tous, pour tous ceux qui voudront bien l’accueillir, y croire et en vivre, de toutes les nations, de toutes les races, peut-être même de toutes les religions… C’est bien ce que signifie cette fête de l’épiphanie. Il y a comme un élargissement par rapport à ce qu’on a fêté à Noël…

Si je reviens à nos mages, et plus exactement à leur itinéraire, il y a pour eux plusieurs étapes qui m’intéressent parce qu’elles ne sont pas très différentes de ce qui se passe dans nos vies à nous.

  • Ce qui les met en route, (1) c’est une étoile, un petit quelque chose qui a changé dans leur quotidien, pas d’une évidence fulgurante, mais suffisamment quand même pour qu’ils s’en rendent compte et que ça bouscule quelque chose en eux d’une recherche de Dieu ou en tout cas d’une recherche d’un sens à ce qu’ils vivent ;
  • (2) il y a ensuite le chemin, la route à faire, avec sans doute pas mal de discussions entre eux, de questions, de doutes peut-être…
  • Après l’étoile et le chemin, (3) nos mages ont l’aide de ce que je vais appeler une tierce personne, Hérode, quelqu’un qui n’est pas dans la même démarche qu’eux, mais quelqu’un qui presque indépendamment de sa volonté va les aider à avancer ;
  • en plus, grâce à lui, (4) ils vont ouvrir les Ecritures, et là c’est la dernière ligne droite pour trouver cet enfant qui vient de naître…

Dans nos vies ça se passe pareil, nous avons des intuitions, des rencontres ou des évènements, qui nous poussent à mettre du sens sur ce qui nous arrive et pourquoi pas à essayer de comprendre qui est Dieu ou à essayer de le découvrir et de le connaître ; et grâce à d’autres personnes ou d’autres évènements, la Parole de Dieu qu’on a peut-être déjà entendue va prendre un jour un sens nouveau et nous permettre d’entrer dans une relation avec ce Dieu auquel nous voulons bien croire…

Je termine en vous proposant qu’on prenne quelques instants de silence pour repérer dans nos vies grâce à qui et grâce à quels évènements nous sommes là aujourd’hui… Qu’est-ce qui nous a mis en route, et qui nous a aidé à avancer ? C’est une invitation à rendre grâce au Seigneur… On peut aussi lui demander qu’il nous aide, chacun à notre mesure, a être des étoiles pour ceux qui sont là autour de nous et qui cherchent un sens ; qu’il nous donne sa force, dans cette eucharistie, pour trouver comment témoigner à notre mesure de sa venue et de sa présence dans notre monde, et qu’il nous permette de faire advenir concrètement son royaume de justice, de paix et d’amour…

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