La grave allégresse

 

J'y faisais déjà allusion il y a quelques semaine à propos de la lecture d'un texte du pape François sur les prêtres, à la lecture des remontées synodales de la phase diocésaine du synode des évêques sur la synodalité j'ai été frappé par l'écart grandissant entre ce que beaucoup, dans le peuple de Dieu, perçoivent de notre ministère et le sens ce que nous sommes et essayons de vivre. Avec un vrai enjeu à mieux nous comprendre mutuellement pour être mieux à notre juste place, les uns et les autres. Ce qui va appeler de se parler pour mieux nous connaître, mais aussi de consentir à nous recevoir mutuellement comme donnés les uns aux autres, pour avancer ensemble, chacun selon nos charismes, nos fonctions et nos états de vie, et à l'écoute des besoins de notre Eglise aujourd'hui, au service de sa mission.

Ceci étant (re)dit, je termine ces jours un très beau livre sur ce qu'est être prêtre aujourd'hui. C'est d'ailleurs le sous-titre de cette publication intitulée La grave allégresse. L'auteur, François Potez, est prêtre du diocèse de Paris, ordonné en 1989, et il nous partage ici huit lettres envoyées à un jeune prêtre qu'il avait accompagné sur son chemin vocationnel et qui est devenu un ami. Dans ces lettres on a à la fois un peu de théologie du ministère – ce qu'est un prêtre – et en même temps des conseils d'un prêtre plus âgé à un plus jeune, le tout empreint d'un témoignage de vie qui se dit ci et là et qui est ponctué de citations de Jean-Paul II – qui a beaucoup marqué notre auteur.

J'ai aimé cette lecture qui, en plus, me permet de relire ma propre expérience et mon propre chemin de vie spirituelle et ecclésiale, dans ce ministère que j'exerce depuis bientôt 17 ans.

J'ai notamment aimé le chapitre sur « Le prêtre, pasteur » (qui fait partie d'un ensemble de trois chapitres sur les trois grandes dimensions du sacerdoce – pour reprendre les mots de l'auteur – : « Le prêtre, époux », « Le prêtre, père » et « Le prêtre, pasteur »). Mais aussi celui qui s'intitule « Le prêtre, homme de la miséricorde » (chapitre 2). J'ai été tout particulièrement rejoint aussi par celui qui porte le titre « Le prêtre, homme de prière », plutôt la première moitié d'ailleurs – avec un manque ou un bémol, par rapport à ce que je vis moi : la question de la place et de l'importance de la Parole de Dieu.

Deux chapitres m'ont plus fait réfléchir, que je n'aurais pas forcément envisagés ainsi, du moins spontanément et pour l'un ou l’autre aspect de ce qui y est dit, mais qui m'ont  intéressé – et qu'il faut travailler, je pense – : celui sur la paternité du prêtre (chapitre 5) et celui sur la dimension mariale du sacerdoce (chapitre 8) :

  1. Sur le premier des deux, je suis toujours et spontanément un peu méfiant, ou plutôt prudent, quant à cette question de la paternité. Car notre ministère renvoie au Christ, le Fils, pas au Père. Certes le Fils est celui qui nous révèle le Père et l'évangéliste Jean nous dit : qui a vu le Fils a vu le Père. Mais nous indiquerons toujours un autre qui indique cet autre qu'est le Père. Et s'il y a une dimension de paternité dans notre ministère, du fait que nous servons l'engendrement à la foi de celles et ceux à qui nous sommes envoyés – mais pour que toute l'Eglise engendre à la foi –, nous ne pouvons le vivre qu'en étant fils dans le Fils – et fils de l'Eglise –, et en étant de ce fait là frères de celles et ceux avec qui nous cheminons, chacun selon son charisme propre et son état de vie, mais frères et soeurs de par notre baptême. Il faudrait évidemment s'arrêter plus sur tout cela pour réfléchir, méditer, articuler, etc.
  2. Sur la question mariale, pareil, je suis spontanément un peu sur la défensive, craignant une théologie qui a pu ne pas être toujours très équilibrée. J'ai été plutôt rassuré, même si je ne signerais pas tout, en tout cas ces pages sont une belle méditation sur la figure de Marie, modèle de tout disciple et qui est aussi notre Mère puisqu'elle est Mère de l'Eglise. Il y a bien sûr des choses à entendre et à prendre.

Hormis ces deux points, qui ne sont d'ailleurs pas des critiques ou un jugement théologique mais des accents spirituels que nous mettons peut-être un peu différemment, j'ai vraiment aimé lire ces pages. Je ne sais trop comment elles seraient reçues par celles et ceux qui se questionnent peut-être autour de nous, je ne sais si elles peuvent aider. Je crois qu'elles sont intéressantes et que, déjà pour nous prêtres, c'est une belle façon de nous ré-interroger sur notre ministère, notre vie spirituelle, et comment nous avançons au coeur de tout cela, pour vous servir.

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François Potez, La grave allégresse. Être prêtre aujourd'hui, Mame, mai 2022,191 pages (petit format), 14€90.

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