17 Novembre 2023
Je referme ces pages que j’aurais lues quasi d’une traite, et je me demande qu’en penser. A la fois j’ai été très touché ci ou là et tout particulièrement par ce qui est mis en mot de la question de la souffrance qui marque nos corps et nos vies, et par la façon d’en parler, notamment avec les figures de Job et d’Elie le prophète. Et en même temps j’ai été parfois étonné du propos sur tel ou tel sujet...
La construction même du livre peut surprendre ou interroger, avec cette question qui me venait en fin de compte : de quoi voulait-on nous parler, de la résurrection de la chair et donc de la question du rapport du corps à l’âme et donc celle de notre rapport à notre corps ? Et du coup on démarre pas cette question du corps – et de la sexualité –, pour dérouler les choses, en direction de ce à quoi nous sommes destinés, la vie éternelle ? Et surtout, l’amorce de la première partie, pour nous parler du corps, est plus qu'étonnante, étrange même : les anges et les démons ! Certes notre jeune auteur – qui est aussi prêtre – s’intéresse à cette question des démons et du diable puisqu’il en a même fait un livre* ; mais c’est surprenant de commencer par là pour un chapitre sur la beauté de nos corps !
Dans ce même chapitre d’ailleurs, j’ai par contre trouvé intéressant et positivement surprenant sa façon de parler de la sexualité et de dédramatiser ou déculpabiliser par rapport à des questions comme la pornographie, non sans excuser ou minimiser, mais en mettant les choses à leurs justes place, y compris la question des fantasmes et du désir. Intéressant. Tout comme l’appel ensuite – dans ce même premier chapitre – à contempler la beauté du corps, et même à apprendre à la contempler, notamment par l’art...
Pour moi, je le redis, les pages sur la souffrance sont excellentes – c’est la suite, le deuxième chapitre. Et je les recommanderais très volontiers à beaucoup ! On y retrouve la figure de Job mais aussi – et là encore c’est intéressant – celle d’Elie le prophète quand il en a mare et veut tout abandonner (1R 19). Allez lire, vraiment !
J’étais par contre un peu moins à l’aise dans la fin de ce même chapitre quand la question du mal est réfléchie en ses causes et que, là, les choses sont réduites à la question du péché sans s’arrêter ou travailler la question de la création encore en devenir – mais rassurez-vous, ce qui est dit ne l’est pas que du point de vue du péché que nous faisons mais aussi quant celui qui produit le mal qui nous tombe alors dessus, ce qui est déjà ça...
Tout cela amène alors notre auteur à parler de la place de la mort dans notre vie et dans notre société occidentale, et hop on glisse au chapitre qui suit (ch. 3) sur la question de l’enfer, oui oui !! – question au demeurant fort intéressante, notamment dans la façon de la traiter ici. Tout cela pour arriver enfin (ch. 4) à la question de la résurrection, celle de Jésus, celle à laquelle nous sommes promis. Et là encore, dans cet ultime chapitre, c’est à la fois bien vu et bien dit et en même temps il y a des choses surprenantes, comme ce détour par le linceul de Turin, le Saint-suaire, pour nous parler du corps de Jésus qui a bien disparu et de son corps glorieux de ressuscité qui est forcément différent... Bon... Par contre ce qui est dit du « purgatoire » sera éclairant, je pense, pour beaucoup…
J’ai envie de finir ces quelques lignes par ces quelques mots que je relève à la p.71 (au coeur des pages sur la question de la souffrance, dans le chapitre 2) : « Dieu est là auprès des coeurs affligés, auprès des corps en souffrance. Il est ce murmure discret qui se fait entendre après le vacarme du mal, ce bien qui ne fait pas de bruit et qui, en se révélant, montre qu’il a toujours été là. Le corps est le lieu de révélation de Dieu, dans le bon et le bien, mais aussi dans le tourment et la souffrance. Il lui faut un espace de résonance, une disponibilité, qui se creuse dans l’action de grâce comme dans la peine. »
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Gaultier de Chaillé, De ta chair, tu verras Dieu. Méditations sur le corps et la résurrection, Mame, septembre 2023, 124 pages, 14€90.
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* à propos du livre de notre auteur sur le diable, c’est par là...