13 Mai 2021
Jeudi 13 mai 2021 - Ascension du Seigneur
[Carmel ND de Surieu]
Ac 1,1-11 / Ps 46 (47) / Ep 4,1-13 / Mc 16,15-20
Il s’en va. Il était là et voilà qu’il retourne au Père. Comme il l’avait d’ailleurs annoncé à ses disciples, dans l’évangile de Jean, avant même sa Passion – nous l’entendions ces derniers jours.
Parlait-il de sa mort qui venait, parlait-il déjà de cette Ascension que nous fêtons ? Peut-être n’est-ce finalement pas la question, car il s’agit d’un même mouvement, d’un même chemin qu’il nous ouvre : son passage de ce monde au Père, un passage, une Pâques, par laquelle il lui faut traverser la mort pour vivre autrement, pour être désormais présent autrement.
40 jours nous séparent d’ailleurs de Pâques, 40 jours de Pâques à cette fête de l’Ascension. 40 jours, comme les 40 ans de marche au désert, entre la libération du pays d’esclavage et l’entrée en Terre promise. 40 ans c’est-à-dire un certain temps, pour dire quasi une vie ; une vie pour apprendre à prendre le chemin qui mène au Père, là où le Christ nous promet une place et nous précède. Là où il veut nous conduire.
Alors oui, il s’en va. Il était là et il retourne au Père. Et il le peut désormais, sans que cela ne trouble outre mesure ses disciples, ses proches, ses apôtres. Car ils ont fait l’expérience que la mort n’est plus la fin de toute vie, qu’elle est bien ce passage, cette Pâques, au creux duquel se trace le chemin.
Ils l’ont vu, ressuscité, ils ont mangé et bu avec lui, ils ont même été invités à le toucher. C’était bien lui. Il est vivant ! Certes, autrement, mais c’est bien lui. Présence qui vient nous rejoindre, nous relever, nous conduire.
Alors il peut retourner au Père, ils savent, leurs yeux se sont ouverts, ou plutôt leur cœur est désormais tout brûlant quand ils pressentent que c’est bien lui, qu’il est bien là, mystérieusement mais réellement. Il peut retourner au Père, ils n’ont plus besoin de preuve, ils savent, ils croient : la mort a été vaincue et la vie est plus forte que tout mal. En Dieu. Avec lui.
Ils peuvent le laisser s’en retourner et devenir ses mains qui vont prendre soin, sa voix pour annoncer la Parole et la Bonne nouvelle du salut, et ses pieds qui iront à la rencontre du plus grand nombre, de par le monde.
D’ailleurs il les envoie : « Allez », leur dit-il, « Allez dans le monde entier. Proclamez l’Évangile à toute la création. Celui qui croira et sera baptisé sera sauvé » …
« Allez » … Et désormais il sera présent par son Église, qui vit de sa Présence invisible que seuls les cœurs peuvent pressentir et qui vit à l’écoute de sa Parole et de ses appels dans le réel concret de chaque jour. Son Église qui est appelée à se laisser façonner jour après jour par cette Parole et par le don de l’Esprit Saint, sa force de vie et d’amour. L’Esprit Saint qui a ressuscité Jésus d’entre les morts, l’Esprit Saint qui est ce don qu’il a promis, cette présence nouvelle que le Père nous envoie. L’Esprit Saint que nous allons invoquer sur le pain et le vin pour qu’ils deviennent sacrement de la Présence du Christ ressuscité, et que nous devenions, nous aussi, par notre communion à ce mystère, que nous devenions ce que nous recevons, le Corps du Christ, que nous devenions chacun et ensemble sacrement de sa Présence. C’est-à-dire ses mains qui vont prendre soin, sa voix pour que le salut soit annoncé, et ses pieds qui vont aller à la rencontre.
Car l’enjeu il est bien celui-là, que nous puissions témoigner de cette Bonne nouvelle incroyable du salut, de ce Dieu qui nous aime de cet amour sauveur que le Christ est venu révéler, sa miséricorde. Que nos vies témoignent de ce salut déjà à l’œuvre, promesse de vie éternelle déjà commencée puisque déjà nous connaissons le Père – déjà nous le connaissons un peu, beaucoup, passionnément – et que déjà nous connaissons – pareillement – le Fils, celui que le Père a envoyé, celui que notre cœur aime et veut suivre.
Et c’est l’affaire d’une vie, tout cela. C’est l’affaire d’une vie d’entrer dans cette dynamique pascale et se laisser ainsi aimer, sauver, entraîner en vie éternelle. C’est l’affaire d’une vie d’écoute de la Parole et d’accueil de l’Esprit Saint, l’Esprit Saint qui fait des disciples que nous apprenons à être les témoins dont le Christ Jésus a désormais besoin pour continuer sa mission.
Il l’a dit, d’ailleurs, on l’a entendu dans la 1ère lecture : « Vous allez recevoir une force, celle de l’Esprit Saint, alors vous serez mes témoins jusqu’aux extrémités de la terre ».
Nous sommes appelés à être ses témoins. Guérir les malades, prendre des serpents dans nos mains, c’est-à-dire prendre la question du mal et du péché à bras le corps et découvrir qu’avec le Christ nous pouvons en être vainqueurs.
Cette mission quasi sacramentelle d’être ce que nous allons recevoir en cette eucharistie, elle appelle à vivre ce que nous avons entendu au début de la 2ème lecture, pour que notre vivre-ensemble soit témoignant et appelant. Et nous le savons bien, c’est un véritable défi que de nous aimer en actes, nous supporter et nous soutenir, avec douceur et patience, avec humilité ; travailler à l’unité par le lien de la paix, et nous aimer les uns les autres comme Jésus nous a aimés, de cet amour même du Père pour ce monde, son amour sauveur, sa miséricorde.
Alors oui, il nous faut demander avec force et insistance l’Esprit Saint, la force de vie et d’amour de Dieu lui-même, l’Amour de Dieu en personne.
Nous avons 10 jours pour cela. 10 jours qui nous sont tout particulièrement donnés pour nous rappeler qu’il nous faut tout-jours le demander et vouloir le recevoir, 10 jours pour nous rappeler que c’est l’affaire de toute notre vie en fait, 10 jours pour nous mettre en disposition toute particulière de recevoir ce don qui nous est fait, pour fonder et refonder en lui l’aujourd’hui concret de notre marche à la suite du Christ.
Alors nous le demandons avec force et conviction, avec confiance, avec foi. Nous le demandons dès maintenant. Qu’il nous rende chacun et ensemble toujours plus attentifs à la Présence du Christ ressuscité à nos côtés, depuis le cœur aimant du Père, le Christ ressuscité qui est là pour tout-jours, comme il l’a promis, mais qui toujours nous précède et nous attend, en nous et dans ce monde, ce monde qui a soif d’amour, de paix et de joie véritable. Ce monde qui attend, même s’il ne le sait pas toujours, une Présence de vie, celle-là même du Christ. Une Présence qui sauve. Ce que nous célébrons et confessons à chaque eucharistie.
Alors oui, que l’Esprit Saint descende sur nous, sur nos communautés et sur nos paroisses, qu’il descende sur toute l’Église du Christ, pour que jour après jours nous devenions toujours plus et toujours mieux ce que nous allons recevoir, le Corps du Christ, sa Présence en actes pour ce monde. Amen.