Homélie dimanche 12 février 2023

6ème dimanche du Temps Ordinaire - Année A

[Dimanche de la santé]

Sanctuaire ND de La Salette / Université d’Hiver du réseau diocésain « Isèreanybody? » (les 18-35 ans)

Si 15,15-20 / Ps 118 (119) / 1Co 2,6-10 / Mt 5,17,37

 

Dans cette page d’évangile il est question de la Loi que Jésus vient accomplir. C’est-à-dire qu’il vient en révéler le sens profond. Et tous les commandements il les résumera en un seul : l’appel à aimer. Aimer Dieu et aimer son prochain comme soi-même. Et nous aimer les uns les autres comme lui-même, le Christ, nous a aimés.

Et on vient de l’entendre, Jésus élargit la compréhension qu’on peut se faire de ces commandements que ceux qui sont là à l’écouter connaissent bien.

L’enjeu de ce qu’il nous dit c’est la question qui nous préoccupe ces jours [le thème de notre Université d’Hiver], c’est celle de la liberté. Non pas celle de « faire ce que je veux comme je veux parce que c’est ce que je veux et que je suis quand même libre ! », mais celle d’un chemin de vie qui nous fasse grandir en liberté, en liberté intérieure, pour nous et pour celles et ceux qui nous entourent.

C’est ça l’enjeu de ce que nous dit Jésus. Et c’est bien ça qui se cache derrière cette histoire d’œil ou de main qu’il vaudrait mieux perdre plutôt que de mourir tout entier ! … L’œil : comment je regarde l’autre ? La main : comment je prends soin de l’autre ? On pourrait ajouter le pied : comment je m’approche de l’autre ?

On sait bien que nos vies sont marquées par le péché, non seulement le mal qu’on fait – et qu’on fait parfois très consciemment – mais aussi par la convoitise – qui entraîne au péché. Parce qu’on croit que l’autre dominé ou le bien de l’autre que je n’ai pas, ça va nous rendre plus heureux ?

Le chemin que Jésus propose il est tout autre. La voie de l’amour. Qui est en même temps la voie du pardon et de la réconciliation – ce dont il est justement question dans notre évangile avec cette histoire d’offrande à déposer et de frère à retrouver et avec qui mettre en mots. Le pardon et la réconciliation : il est là le chemin d’une liberté véritable.

Parce que si je regarde pour de vrai ma vie, si chacun de nous regarde pour de vrai sa vie : outre les épreuves, qu’est-ce qui nous paralyse ? Qu’est-ce qui nous empêche parfois d’avancer ? Et même : qu’est-ce qui nous rend malheureux ?

Les jugements, la comparaison, la soif de toujours plus, notre capacité à faire le mal même qu’en nous voudrions faire mieux, notre péché et nos limites humaines, toutes les fois où nous voulons nous en sortir mais où nous faisons l’expérience que nous chutons et rechutons…

Il me semble que dans tout cela on fait l’expérience de ne pas toujours être très libres… Or Jésus nous propose un chemin de liberté. Un chemin de libération. Un chemin de salut.

Comment ? En apprenant à le suivre. En apprenant à vivre de ses appels d’Évangile. En apprenant à regarder l’autre avec son regard aimant à lui, son regard qui croit en chacun, quelle que soit son histoire ou le mal qu’il ait pu faire, un regard qui va apprendre à ne pas enfermer l’autre dans ses erreurs ou dans ce qu’il donne à voir de lui.

Il s’agira aussi d’apprendre à le suivre – suivre Jésus et ses appels d’Évangile – en apprenant à nous faire proche de l’autre et à prendre soin de lui et de la relation entre nous. Ce qui appellera là encore à vivre des chemins de pardon et de réconciliation. Et là, sur ces chemins de pardon et de réconciliation, là est la vraie liberté. Parce que là nous allons apprendre à ne pas laisser le mal nous tenir sous son pouvoir – aussi bien le mal subi que le mal que nous commettons.

Et là nous allons apprendre à vivre des libérations, libération de l’enfermement dans lequel peut nous mettre le mal et le péché. Ça nous replie sur nous-mêmes, or un chemin de libération est possible. Par la mise en mots de ce qui s’est joué entre nous – il en était question dans l’évangile –, par la décision aussi d’avancer et de dépasser ce qui a pu casser la relation, et par l’apprentissage à ne pas réduire l’autre ou me réduire moi-même aux actes que nous avons pu commettre. Nous valons bien plus que nos actes…

Parfois ce chemin nous semble difficile voire impossible. Acceptons qu’il faille du temps. Et acceptons que nous ayons besoin de l’aide de Dieu et des autres… Demandons à Dieu sa force, demandons-lui sa grâce, demandons-lui qu’il nous éclaire sur les possibles à vivre. Mais ensuite osons, osons alors faire le pas. Avec lui qui sera notre force et notre paix. Avec lui qui va nous éclairer et nous accompagner.

Osons. C’est-à-dire choisissons la vie plutôt que de rester dans des chemins de mort. C’est ça être libres. C’est ça le chemin de libération que le Christ nous propose.

Et c’est bien ce que nous disait à sa façon la 1ère lecture quand Ben Sira le Sage nous dit qu’il dépend de nous d’être fidèles aux commandements de Dieu, Dieu qui nous propose la vie et la mort, Dieu qui nous les présente et nous laisse choisir où nous voulons aller.

Je ne sais pas vous, mais moi j’ai plutôt envie de trouver comment avancer sur un chemin de vie. J’ai plutôt envie d’apprendre à rejeter le mal et le péché, du moins à ne pas les laisser conduire ma vie et me tenir sous leur emprise, sous leur esclavage. Choisir la vie. Elle est là la liberté véritable que Dieu veut pour nous.

Et il est là le chemin du bonheur, comme disait le psaume. Oui, heureux est l’homme qui suit la loi du Seigneur, heureux qui garde ses exigences et qui cherche à suivre le Seigneur de tout son cœur. Suivre ses commandements, apprendre à mieux vivre à l’école du Christ, se laisser enseigner par lui, voilà la « récompense » dont parlait le psaume, voilà le chemin de vie que Dieu nous propose.

Et il nous le propose par amour, il nous le propose parce qu’il nous aime et qu’il nous veut vivants, vivants à sa suite, vivants avec lui. Vivants parce que libérés de l’emprise du mal et du péché, libérés de la peur et du découragement dans nos épreuves, et libérés de la solitude dans laquelle tout cela peut nous mettre.

L’enjeu c’est vraiment ça, c’est la vie, et la vie ensemble, la vie les uns avec les autres, les uns grâce aux autres.

D’ailleurs ce dimanche c’est le Dimanche de la santé. Et cette expérience de la vie que les autres peuvent m’aider à recevoir et à accepter quand je souffre c’est vraiment ça à quoi Dieu nous appelle.

La maladie, par exemple, isole toujours, la maladie décourage, la maladie questionne le sens à vivre. Et on a besoin des autres qui vont nous aider à rester debout ou à nous relever, les autres qui sont là à nos côtés et qui vont nous aider à expérimenter que la vie nous traverse, malgré tout, et qui vont nous permettre de vivre une véritable expérience de libération de l’emprise du mal sur nous.

C’est la même expérience qu’on peut vivre de plein des manières, chaque fois que le mal nous fait douter de nous, de Dieu, des autres et même de la vie – le mal qui nous tombe dessus comme notre péché – ; et chaque fois que là nous est pourtant donné d’expérimenter quelque chose de la vie qui nous traverse et nous entraîne…

Alors demandons au Seigneur de nous donner de goûter à celle libération-là qui s’appelle le salut. Qu’il nous donne de découvrir que là est le chemin de la liberté, celui d’être libéré du pouvoir du mal et de la mort, celui de consentir à la vie qui nous traverse, dans le réel concret de ce que nous sommes y compris jusqu’en nos fragilités quelles qu’elles soient. Car c’est justement là Dieu veut nous rejoindre et c’est là qu’il peut se révéler à nous. Et là nous goûterons à ce bonheur qu’il nous promet et dont parlait le psaume...

Prenons quelques instants de silence pour laisser tout cela descendre en nous, pour laisser tout cela résonner en nous. Et tout simplement offrons au Seigneur ce que ça vient réveiller en nous ; offrons au Seigneur le réel de notre vie, de notre péché comme de nos fragilités.

Et demandons-lui que là il vienne nous rejoindre en cette eucharistie, et que nous devenions toujours plus, ensemble et les uns pour les autres, que nous devenions toujours plus son regard qui va croire en l’autre, malgré tout peut-être mais réellement ; que nous soyons aussi et toujours plus ses mains qui vont prendre soin et soigner ; et que nous puissions être ses pieds qui oseront s’approcher et marcher avec l’autre en ce qu’il a à traverser.

Nous prenons quelques instants de silence et nous offrons au Seigneur ce que tout cela vient faire monter en nous. Qu’il nous éclaire et qu’il le porte avec nous. Amen.

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