Dilexi te

Dilexi te

Voilà, ce sera le premier texte du pontificat du pape Léon XIV. Et comme son prédécesseur qui terminait une lettre encyclique de Benoît XVI sur la foi et l’offrait à l’Eglise, le Pape Léon XIV a repris à son compte ce qui aurait pu être la dernière exhortation apostolique du pape François, telle une continuation de Dilexit nos ou une mise en pratique concrète et sociale.

Car c’est bien de Doctrine socaile dont il s’agit ici, comment l’amour doit s’incarner, cette charité à laquelle nous sommes appelés et dont les premiers destinataires sont les plus pauvres, ceux qui souffrent. Mais plus que des destinataires de nos bonnes oeuvres ils sont aussi des frères et de soeurs en humanité, des frères et soeurs en Christ, ils sont même la chair vivante et souffrante du Christ lui-même.

Alors il faut entendre cela. Il y a comme un appel nécessaire. Et le pape Léon XIV insiste. Un appel nécessaire, oui, mais qui est en fait un rappel nécéssaire. Car tout cela, en fait, nous le savons, le pape François l’a déjà beaucoup dit, notamment dès Evangelii Gaudium – son grand texte programmatique, abondamment cité en ces pages. Ainsi que dans son encyclique Fratelli tutti – à laquelle on est beaucoup renvoyés aussi.

Mais c’est encore à entendre, oui, à incarner, à faire nôtre. Chacun et ensemble – une conversion personnelle et communautaire. Pour être cette Eglise de la miséricorde à laquelle nous sommes appelés, une Eglise qui marche avec, une Eglise qui annonce et vit du salut avec celles et ceux qui en sont les premiers destinataires.

Alors oui, diront certains, rien de bien nouveau. Et peut-être d’autant plus pour nous, dans le diocèse de Grenoble-Vienne, avec le chapitre introductif des orientations pastorales que notre évêque nous a donné juste avant l’été ; avec les mêmes insistances ! Rien de bien nouveau donc, peut-être, mais justement : raison plus de l’entendre, et de s’y mettre plus encore, de le vivre !

Concrètement, on retrouve un plan assez habituel pour le pape François, qui est en tout cas assez semblable à celui de Dilexit nos :

  • après un chapitre introductif qui pose les idées fortes du texte et son pourquoi,
  • le pape nous propose une chapitre biblique, très intéressant,
  • puis une partie peut-être un peu plus aride, plus historique, sur la spiritualité d’une charité en actes pour et avec les pauvres – où l’on égrène des figures de sainteté et des congrégations qui ont vécu tel ou tel aspect de ce que nous sommes appelés à vivre.
  • Viennent ensuite deux chapitres de Doctrine sociale de l’Eglise – qui se fait tout particulièrement concrète et vraiment pour nous à partir du n°91 (et tout ce qui suit).
  • Avec des très belles pages conclusives sur l’aumône comme premier geste concret que nous pouvons tous vivre...

Le tout se lit assez bien et ce n’est pas très long. Mais s’il fallait ne lire que certains passages significatifs, je recommanderais plus particulièrement les deux 1ers chapitres puis à partir du n°91.

Ceci étant le plan est assez intéressant pour se faire une idée concrète du contenu du texte – ainsi que les trois images qui suivent, qui sont une mise en schéma et en résumé proposé par le Dicastère pour le service du développement humain intégral, et qui disent bien le contenu du texte – :

  • Chapitre 1. Quelques paroles indispensables
    • Saint François [n°6-7]
    • Le cri des pauvres [n°8-12]
    • Préjugés idéologiques [n°13-15]
  • Chapitre 2. Dieu choisit les pauvres
    • Le choix des pauvres [n°16-17]
    • Jésus, Messie des pauvres [n°18-23]
    • La miséricorde envers les pauvres [n°24-34]
  • Chapitre 3. Une Eglise pour les pauvres
    • La vraie richesse de l’Eglise [n°37-38]
    • Les Pères de l’Eglise et les pauvres [n°39-40]
    • Saint Jean Chrysostome [n°41-42]
    • Saint Augustin [n°43-48]
    • Le soin des malades [n°49-52]
    • Le soin des pauvres dans la vie monastique [n°53-58]
    • Libérer les captifs [n°59-62]
    • Témoins de la pauvreté évangélique [n°63-67]
    • L’Eglise et l’éducation des pauvres [n°68-72]
    • Accompagner les migrants [n°73-75]
    • Auprès des derniers [n°76-79]
    • Les mouvements populaires [n°80-81]
  • Chapitre 4. Une histoire qui continue
    • Le siècle de la Doctrine sociale de l’Eglise [n°82-89]
    • Des structures de péché qui créent pauvreté et inégalités extrêmes [n°90-98]
    • Les pauvres comme sujets [n°99-102]
  • Chapitre 5. Un défi permanent
    • De nouveau le bon Samaritain [n°105-106]
    • Un défi incontournable pour l’Eglise d’aujourd’hui [n°108-114]
    • Donner, encore aujourd’hui [n°115-121]

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Pape Léon XIV, Dilexi te - Je t’ai aimé, exhortation apostolique sur l’amour envers les plus pauvres, Editions Emmanuel, octobre 2025, 105 pages (pour cette édition-là), 4€90 (petit format).

D’autres éditions sont disponibles ; et c’est aussi téléchargeable via ce lien sur le site du Vatican.

Dilexi te
Dilexi te
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Quelques citations, pour qui voudrait :

- [au n°2] Contempler l’amour du Christ « nous aide à être plus attentifs aux souffrances et aux besoins des autres, nous rend assez forts pour participer à son oeuvre de libération en tant qu’instruments de diffusion de son amour ».

- [au n°7] Je suis convaincu que le choix prioritaire en faveur des pauvres engendre un renouveau extraordinaire, tant dans l’Eglise que dans la société, lorsque nous sommes capables de nous libérer de l’autoréférentialité et que nous parvenons à écouter leur cri.

- [au n°21] Jésus (...) se manifeste (...) comme Celui qui, aujourd’hui dans l’histoire, vient réaliser la proximité aimante de Dieu, qui est avant tout une oeuvre de libération pour ceux qui sont prisonniers du mal, pour les faibles et les pauvres.

- [aux n°26-27] on ne peut aimer Dieu sans étendre son amour aux pauvres. L’amour du prochain est la preuve tangible de l’authenticité de l’amour pour Dieu, (...) tout acte d’amour envers le prochain est en quelque sorte un reflet de la charité divine (...). C’est pourquoi les oeuvres de miséricorde sont recommandées comme signes  de l’authenticité du culte qui, rendant gloire à Dieu, a pour tâche de nous ouvrir à la transformation que l’Esprit peut opérer en nous, afin que nous devenions tous des images du Christ et de sa miséricorde envers les plus faibles.

- [au n°42] la charité n’est pas une voie facultative, mais le critère du vrai culte.

- [au n°52] Lorsque l’Eglise s’agenouille auprès d’un lépreux, d’un enfant sous-alimenté ou d’un mourant anonyme, elle réalise sa vocation la plus profonde : aimer le Seigneur là où il est le plus défiguré.

- [au n°58] l’Eglise n’est pleinement épouse du Seigneur que lorsqu’elle est également soeur des pauvres.

- [au n°79] les pauvres ne sont pas seulement l’objet de notre compassion, mais des maîtres d’Evangile. Il ne s’agit pas de « leur apporter » Dieu, mais de le rencontrer en eux.

- [au n°103] L’amour des pauvres est un élément essentiel de l’histoire de Dieu avec nous et, du coeur même de l’Eglise, il jaillit comme un appel continu au coeur des croyants, aussi bien des communautés que des fidèles individuels. (...) C’est pourquoi l’amour des pauvres – quelle que soit la forme sous laquelle se manifeste cette pauvreté – est la garantie évangélique d’une Eglise fidèle au coeur de Dieu.

- [au n°104] Le chrétien ne peut pas considérer les  pauvres seulement comme un problème social : ils sont une « question de famille » ; ils sont « des nôtres ».

- [aux n°115-116] l’aumône reste (...) un moment nécessaire de contact, de rencontre et d’identification à la condition d’autrui. (...) elle invite au moins à s’arrêter et à regarder la personne pauvre en face, à la tou her et à partager avec elle quelque chose de soi-même.

- [au n°119] L’amour et les convictions les plus profondes doivent être nourris, et cela se fait par des gestes. (...) nous avons besoin de nous exercer à l’aumône pour toucher la chair souffrante des pauvres.

- [au n°120] l’amour chrétien est prophétique. (...) L’amour est avant tout une façon de concevoir la vie, une façon de la vivre. Eh bien, une Eglise qui ne met pas de limites à l’amour, qui ne connaît pas d’ennemis à combattre, mais seulement des hommes et des femmes à aimer, est l’Eglise dont le monde a besoin aujourd’hui.

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